Entre nous, à POPnews, ça nous arrive de discuter de ce que l’on écoute. Je crois que j’ai fait peur à mon collègue Julien en disant “c’est un bon album de faces B” pour qualifier cet album de Lord Huron. Si je ne pensais pas à mal, c’est en effet la première impression qui m’est resté à l’écoute de ces 14 chansons, dans une droite lignée de ce qu’ont fait les Californiens sur “Lonesome Dreams”. Ledit album m’accompagne encore par sa richesse mélodique, ce foisonnement et en même temps cette sérénité réelle.
Ces ingrédients sont toujours là. Indéniablement, Lord Huron a maintenu ses standards d’écriture, en puisant comme toujours dans une tradition américaine située sur un arc soft-rock 70’s / Springsteen / Fleet Foxes. Ici, l’homogénéité du résultat n’est pas source de frustration, elle rappelle surtout que la plume des Américains – sauf à considérer que Ben Schneider est seul aux commandes, ce qui semble être le cas néanmoins – ne s’affadit jamais. En 14 titres, Lord Huron arpente des paysages ouverts, laissant toute place à l’imaginaire pour se déployer sur “Love Like Ghosts”, “Until the Night Turns” ou “Frozen Pines”, évoquant aussi bien le désert que la montagne. Le sens du récit, la faculté à installer une atmosphère et une énergie à la Springsteen (j’insiste) sur “La belle fleur sauvage”, “Fool For Love” ou encore le final de “Dead Man’s Hands” (la présence de l’harmonica en rajoute une couche d’ailleurs) n’est pas non plus pour me déplaire.
Peut-être plus énergique que son prédécesseur, “Strange Trails” semble porté vers des contrées plus chaleureuses aussi. Je repense alors à la pub iTunes que je vois fleurir partout “Si vous aimez Bon Iver, vous aimerez Lord Huron” : on ne peut pourtant pas faire plus éloigné que ces deux projets musicaux, ne serait-ce que dans l’intention et dans la façon de donner vie aux morceaux. Lord Huron semble rechercher l’espace, un souffle de vie qui donne envie de prendre la route (une thématique récurrente dans les paroles des chansons), renouant avec une forme de mythologie, sur la valeur humaine du voyage. Celui-ci est ponctué de haltes (“The Yawning Grave”, sublime ballade au clair de lune, “Way Out There”) avant une dernière étape, “The Night We Met”, qui convoque le romantisme du jeune Springsteen période “Born to Run”. Une dernière étreinte, une fin en soi qui appelle pourtant à renouveler l’écoute de ce qui s’impose, avec le temps, comme un très grand disque. Bien plus encore qu’un bel album de faces B en somme…