Nous avons parfois tendance à l’oublier, mais Bill Ryder-Jones est avant tout un guitariste. Alors que ses deux premiers albums solos avaient vu le co-fondateur de The Coral s’éloigner plus ou moins nettement de son instrument de prédilection, ce « West Kirby County Primary » affirme sa volonté de remettre la guitare au centre des débats. C’est d’ailleurs ce qui retient l’attention lors des premières écoutes : le jeune trentenaire semble avoir voulu faire parler la poudre, sacrifiant l’écriture sensible de son remarquable « A Bad Wind Blows in my Heart » (2013) sur l’autel du désir d’électricité.
L’impression est trompeuse, le premier single « Two to Birkenhead », avec ses allures de décalque malhabile de Pavement, n’étant finalement pas très représentatif de la tonalité générale de ce disque. En effet, si le multi-instrumentiste anglais cherche bien par moments à muscler son jeu (« Let’s Get Away From Here »), et si l’influence de l’indie-rock américain des 90’s est manifeste, son troisième effort est avant tout une œuvre de caractère intime, écrite et en partie enregistrée dans sa chambre d’enfant, chez sa mère à West Kirby près de Liverpool. Forcément introspectives et recouvertes du voile de la nostalgie, ces nouvelles chansons s’offrent moins facilement, mais finissent par se révéler au moins aussi captivantes que ses tentatives passées (« Daniel », « Wild Roses »). Situé en avant-dernière position, le puissant « Satellites » est un pic émotionnel, toute la mélancolie et la tension sous-jacente du disque affleurant alors par la grâce d’une éruption finale aux vertus rédemptrices.
Déjà salué pour son rôle de producteur sur le premier album de l’une des révélations de l’année (Hooton Tennis Club), Bill Ryder-Jones s’installe pour de bon parmi les songwriters anglais les plus doués de sa génération.