Après le KO technique des trois précédents albums, Deerhoof, jamais à cours de trucs, nous fait (c’est tout relatif) le coup de la simplicité et du rock n’ roll. Dans l’asile de fous, près de chez vous.
Après trois disques hautement enthousiasmants et réalisant une synthèse des aspirations tous azimuts de nos gaillards (« Deerhoof vs Evil« , « Breakup Songs« , « La Isla Bonita« ), Deerhoof revient avec une production une peu moins ronde, a priori moins directement convaincante, du moins pour nos cerveaux malades. Je m’explique : oui, il y a des titres simples sur « The Magic« . Un comble !!! Ainsi « That Ain’t No Life to me« , renvoie Iggy à la niche du garage rock étroit de Detroit, et « Dispossessor« se la joue punk rock des familles rangées (avec respectivement Ed et John… au chant !). « Plastic Thrills« rejoue le mythe faustien en diable (sympathique) et est sauvé de justesse par une ironie, quand même, perceptible mais sur le fil. Nous aurait-on changé nos Deerhoof ? Attention, rien d’absolument mauvais là dedans, c’est juste qu’on nous avait habitué à une déferlante d’idées bousculées, d’humour musical, de constructions pop et post.
Heureusement, il y a toujours des flamboyances dans le genre chansons kaléidoscopiques en forme de tête à queue. Et même clipées à l’avenant :
Pas d’inquiétude non plus du côté de la santé mentale, le guitariste John Dieterich est toujours bon à interner (ah ce riff punky-funky de « Debut« , il fallait le trouver) :
N’oublions pas le reste de la bande car quiconque les a vus au moins une fois en concert, aura du mal à décerner la palme de la cinglerie et du talent (et de la composition d’ailleurs). En effet, il faut être sacrément cintrés pour écrire un titre sucré-amer comme « Kafe Mania« , tour à tour hard-rock, pop vaporeux et… noise ! A recommander à vos amis caféinomanes et en études de musicologie pour leur dépoussiérer le ciboulot.
Vous me ferez le plaisir également de classer directement dans votre playlist Spotify consacrées aux fous chantants, « Learning to apologize« , un des tubes de l’album, musclé comme les mollets de Greg Saunier, drôle comme les costumes chamarrés de Ed Rodriguez et les paroles dada de Satomi Matsuzaki (ces lalalalas improbables).
Bref, « The Magic« est un album un peu plus direct que les trois précédents, étalons d’or d’une discographie pléthorique et fouillée, avec des ambiances et des goûts variés, un peu plus balisés sur un format classique (toute proportion gardée). Par ailleurs, comme tout bon album de Deerhoof, les écoutes répétées (et au casque) révèlent une science consommée de l’art de la production, ainsi que mille et un détails qui donnent le tournis (mais où vont-ils chercher tout ça ?). Ok, c’est bon, Deerhoof reste notre groupe favori, parce que foufou, parce qu’intelligent, parce que dansant, parce que surprenant. La magie reste intacte.