BEN KWELLER
Avec son visage de poupon on a peine à croire que Ben Kweller est maintenant papa. Un événement sans doute propice à se retourner sur le chemin parcouru… Ce troisième album éponyme, succédant à « Sha Sha » et « On My Way », est donc l’occasion pour Ben Kweller de se poser et sonder la mémoire d’une carrière déjà bien remplie et d’une adolescence peu commune puisque passée en partie en tournée…
J’ai lu que tu avais pratiquement tout fait seul, joué chacun des instruments. Cet album sonne très naturel, comment as-tu fait pour garder cette spontanéité ?
Je vois ce que tu veux dire. Rien n’est enregistré comme avec un groupe mais il y a une façon de jouer qui fait que c’est possible. Il y a une chanson, « Penny on the Train Track » qui sonne comme un groupe live et c’est principalement parce que beaucoup d’idées me viennent en studio, je laisse les choses arriver, et donc c’est assez similaire au fait d’être avec un groupe excepté que je joue sur la piste précédente mais rien n’est figé au préalable, j’essaie de me mettre dans les conditions où ça reste instinctif.
Est-ce proche de ta façon de composer ?
Pour cet album oui, c’est très proche. J’écrivais et j’allais les faire écouter à mon ami qui a un studio chez lui et c’est là que je construisais les chansons, que je trouvais les directions à leur donner. Je n’avais jamais enregistré de cette façon, c’était très nouveau.
Est-ce qu’à cette étape de « pré-enregistrement » tu penses déjà aux arrangements ou ils viennent plus tard ?
Les grandes lignes sont apparues à ce moment-là… J’ai fait la pré-production avec Gil Norton mon producteur sur ce disque, on a discuté des changements à faire, et on est entré en studio… six semaines d’enregistrement.
La part que prend Gil Norton est donc très importante, presque comme un duo ?
Oui ! Exactement ! C’est vraiment ça, un partenariat, une équipe. En studio, nous n’étions que trois, Gil, l’ingénieur du studio et moi.
« On My Way » ton précédent album sonnait assez folk-rock et cet album sonne plus pop…
… « On My Way » est plus folk mais sur certains cotés très rock aussi, plus « crade »… ce nouvel album pour moi est surtout plus… lumineux…
Te considères-tu toujours comme un chanteur anti-folk ?
Non, plus vraiment, je pense être juste un chanteur de rock… au sens classique du terme, comme… Bruce Springsteen. C’est plus proche de ce que je vis maintenant, quelqu’un qui veut s’adresser au plus de gens possible.
Qu’était l’anti-folk pour toi ?
C’est quelque chose que je faisais quand j’étais plus « jeune », un truc plus juvénile… En fait c’est du punk acoustique, un truc plutôt adolescent. Ma musique maintenant est plus traditionnelle, je veux m’adresser à tout le monde. Je vois la musique comme un rassemblement, l’antifolk est trop réducteur. Je veux vraiment pouvoir toucher le plus de gens possible, c’est pour ça que je suis revenu à quelque chose de plus « classique »…
Il y a une idée qui traverse ce disque, comme une nostalgie, jusqu’à une incapacité d’être là au moment présent. Les thèmes du passé et du futur sont très développés… quelque chose aussi de l’ordre de l’attente…
Oui, c’est vraiment un disque assez nostalgique. Un disque où je me pose pour regarder derrière moi. Je parle beaucoup de voyages, de l’idée de passer à travers les choses, de bouger sans s’arrêter. La vie est courte, tu dois suivre tes rêves et cet album parle de ça, des hauts et bas qui jalonnent la vie, je parle des gens, je raconte l’histoire de gens… normaux.
Comme sur « Penny on the Train Track » ?
Oui, par exemple. Dans cette chanson chaque couplet est une histoire. Le thème global est combien la vie est courte et que nous ne sommes finalement que des pièces de monnaie sur des rails et le train arrive… Il faut faire vite, maintenant. C’est à toi de faire en sorte que ta vie soit remplie… sur un couplet, je raconte la rencontre avec un de mes amis avec qui j’ai grandi au lycée et que j’ai retrouvé, il est devenu policier ! Ca m’a remué ! Je me suis rendu compte qu’on avait grandi, qu’on avait des responsabilités, ça m’a foutu le vertige…