SALVATORE – Tempo
(Racing Junior/Poplane)
Malgré son nom qui fleure bon le soleil, Salvatore n’est pas un chanteur de charme italien, mais un groupe qui nous vient du froid (de Norvège, plus précisément), comme le laisse supposer le paysage brumeux et enneigé qui illustre la pochette. S’il peut donc espérer profiter de l’actuelle "vague" scandinave, il est tout de même peu probable qu’il passe sur les mêmes radios que les inconsistants Eskobar et consorts, ou qu’il bénéficie de la même cote d’amour que les Kings of Convenience. Formé il y a cinq ans, Salvatore pratique en effet un rock instrumental et répétitif, pas excessivement expérimental, mais qui ne risque guère de trouver les faveurs des FM commerciales et des amateurs de mélodies bien troussées. Ce qui n’a d’ailleurs pas empêché "Tempo", leur quatrième album (les précédents ont échappé à nos radars), d’être nommé l’année dernière aux Spellemannsprisen, l’équivalent norvégien des Grammy Awards ou des Victoires de la musique.
Enregistré à Chicago, produit par John McIntire, le disque appelle forcément les comparaisons avec Tortoise et d’autres groupes de la ville, mais on peut convoquer d’autres noms, comme les Américains Pell Mell, constructeurs méconnus d’autoroutes sonores (plus proches toutefois du rock à guitares), ou quelques électroniciens allemands actuels influencés par les techniques du dub. Salvatore applique, sans génie mais avec un savoir-faire certain, une grammaire désormais bien connue : rythmiques syncopées et imperturbables, répétitions de petits motifs mélodiques, basse aquatique ("Atlantic") ou d’une rigidité très post-punk ("Rainbo"), échos, percussions métalliques, zébrures de guitares saturées, le tout donnant une impression de statisme hypnotique. Formé autour d’une admiration commune pour Neu !, Salvatore semble rendre hommage à ce groupe allemand mythique des années 70 sur "Rockefeller 3", de loin le morceau le plus long du disque (9’06"), qui, avec sa répétition d’un seul riff basique, rappelle fortement "Hallogallo" (10’07 ») de Neu !, et aussi le non moins mythique "Krautrock" de Faust, morceau encore plus long (et au son nettement plus sale). "Tempo" semble donc arriver un peu après la bataille post-rock, mais cette copie de bons élèves studieux n’est pas sans charme, pour peu qu’on goûte ce genre d’expérience.
Vincent
Easy
Not Chello
Atlantic
JS Bells
Rainbo
Tempo
Rockefeller 2
Rockefeller 3
Poor Coal