YO LA TENGO – Popular Songs
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Le terme n’existe pas vraiment, mais il leur irait comme un gant : Yo La Tengo est ce qu’on pourrait appeler un "groupe de proximité". Ce qui n’est pas tout à fait la même chose qu’un groupe populaire, et il faut sans doute voir de l’ironie dans le titre de leur nouvel album (quelque chose comme le douzième), "Popular Songs". Leurs fans ne se comptent peut-être pas en dizaines de millions, mais la plupart sont fidèles, certains même depuis les premiers disques confidentiels des Américains, il y a près de 25 ans. Le trio leur en sait gré, qui leur proposait il y a quelques mois des concerts "Free Wheeling", histoire de briser la glace et la routine des tournées : formation acoustique et séances de questions/réponses avec le public. Quelques jours avant leur escale parisienne, on s’était retrouvé à quelques mètres d’Ira Kaplan et Georgia Hubley dans le métro de Barcelone, lors du festival Primavera auquel le groupe participait. Ils ressemblaient à un couple d’Américains en goguette – plus intellos East Coast que Californiens bling-bling, certes – et on était presque étonné que quelques voyageurs leur demandent s’ils pouvaient être pris en photo avec eux.
Des gens ordinaires, donc, pour une musique qui l’est rarement. "Popular Songs" en est une nouvelle démonstration, peut-être pas aussi brillante que celle du précédent album "I Am Not Afraid of You and I Will Beat Your Ass", mais comme toujours quelques coudées au-dessus de la moyenne indie rock. Depuis au moins leur génial "I Can Hear the Heart Beating as One" (1997), Yo La Tengo explore sur chaque nouveau disque une multitude de pistes et de genres, sans jamais paraître s’éparpiller, et sans trop se répéter. C’est encore le cas ici. Certes, on retrouve des chansons qui sont du Yo La Tengo pur jus, et qui sont sans doute les plus immédiatement séduisantes du disque (proximité, disions-nous). Popsongs graciles ou plus nerveuses, aux guitares claires ou saturées, ballades tout en retenue : on est en terrain "post-Velvet" connu, mais on est une nouvelle fois épaté par la facilité avec laquelle nos amis d’Hoboken écrivent de petits classiques instantanés comme "Avalon or Someone Very Similar" ou "Nothing to Hide".
S’inscrivant dans une veine déjà explorée sur l’album précédent avec des titres comme "Mr Tough", d’autres morceaux vont chercher leur inspiration du côté des musiques dites noires : le funk, le rhythm’n’blues, le son de Stax ou de la Motown ("If It’s True"), les BO des films de blaxploitation 70’s… Ce qui pourrait paraître forcé, un peu ridicule ou simplement parodique chez d’autres passe ici comme une lettre à la poste. Quant à l’engourdi et brumeux "By Two’s", il peut rappeler aussi bien les chansons de Nico que celles de… The XX, la hype (justifiée) du moment – d’autant plus amusant qu’Ira et Georgia pourraient être les parents des quatre jeunes Londoniens. Voilà pour la partie "songs", soit les neuf premières plages du CD, et la moitié seulement de sa durée. Les trois morceaux qui suivent totalisent près de 37 minutes et, pour tout dire, on n’est pas sûr de les écouter très souvent en entier. C’est un peu les faces C et D de "Popular Songs", elles auraient pu être intitulées "I Am Not Afraid of You and I Will Beat Your Ears", et c’est aussi pour tout ça qu’on aime Yo La Tengo.
Vincent Arquillière
A lire également, sur Yo La Tengo :
l’interview (2009)
la chronique de « I Am Not Afraid of You And I Will Beat Your Ass » (2006)
la chronique de « Prisoners of Love » (2005)
la chronique de « Summer Sun » (2003)
la chronique de « And Then Nothing Turned Itself Inside Out » (2000)
Here to Fall
Avalon or Someone Very Similar
By Two’s
Nothing to Hide
Periodically Double or Triple
If It’s True
I’m on My Way
When It’s Dark
All Your Secrets
More Stars Than There Are in Heaven
The Fireside
And the Glitter Is Gone