Au rayon des divas gays plus ou moins excentriques, après Rufus Wainwright et Antony and the Johnsons, voici Perfume Genius, nanti d’un nouvel album qui confirme qu’il n’est pas juste un feu de paille mais bien un auteur singulier. Pour ceux qui prennent le train en marche, rappelons que Mike Hadreas avait sorti un premier album chancelant et fragile comme lui-même en 2010 (« Learning »). Exercice alors hautement cathartique après quelques années d’errance et de perdition (dépendance précoce à l’alcool). Notre éphèbe persiste et signe avec des chansons écrites à la lueur d’une chandelle, sur son piano et d’une voix fluette de plus en plus affirmée. Quelques arrangements bien sentis (cuivres, cordes, roulements de tambours, guitare) enluminent le tout avec finesse. Pour l’essentiel, ce sont des mélodies à l’os avec des textes à moelle qui sondent toujours les tourments de l’âme. Et c’est beau, juste. A peine détecte t-on un peu de maniérisme au détour d’un refrain ou d’une montée vocale. On pense alors à Antony Hegarty dont il reprend certains tics affectés : supplique vibrante et choeurs cajoleurs. Esthétique gay à souhait aussi, assumée jusque dans le clip de « Hood » où le frêle garçon joue la poupée dans les bras d’un acteur porno gay bodybuildé. C’est moins subtil que le clip de « Look out, Look out » où il prenait l’allure d’un James Dean égaré dans un motel quelconque (photographie magnifique). Sans doute le besoin de provoquer un peu et de s’assumer pleinement à travers son art, quitte à faire dans le mauvais goût. L’essentiel n’est pas là mais dans la mélancolie lumineuse des mélodies, dans ce chant où s’étranglent d’anciens sanglots. « Put Your back N 2 It » est un disque plutôt apaisé malgré la densité émotionnelle qu’il charrie, un disque qui a chassé les démons de jeunesse et qui ouvre un nouvel horizon. Une œuvre aboutie aussi, même si, comme moi, on peut préférer les esquisses brouillonnes du premier jet.