Dans la foulée de son retour en grâce discographique (“Mirror Traffic”, produit par Beck, en 2011), le sixième album post-Pavement de Stephen Malkmus voit le songwriter assumer pleinement son statut d’icône indie-rock. C’est précisément parce que l’Américain s’emploie ici à exercer sa spécialité, cette pop génialement bancale dont il a fait sa marque de fabrique dès le début des années 90, que “Wig Out at Jagbags” est une réussite. Il leur aura certes fallu s’armer de patience, mais ceux qui guettaient un véritable retour aux choses sérieuses peuvent à présent se réjouir : à 47 ans, l’ancien Berlinois d’adoption renoue enfin, sur toute la longueur d’un album, avec les grandes heures de “Crooked Rain” ou “Wowee Zowee”. Façonnées dans les Ardennes par l’ingénieur du son hollandais Remko Schouten, les chansons s’enchaînent ici comme de petits miracles, enrichissant de quelques nouvelles pépites biscornues (“Houston Hades”, “Cinnamon and Lesbians”…) un catalogue déjà copieusement garni. Le single “Lariat”, exercice de style slacker-pop d’une efficacité diabolique, incarne admirablement le regain de forme inespéré qui anime aujourd’hui notre héros des années lo-fi. Constamment cité en exemple par une ribambelle de jeunes artistes, Malkmus rappelle qu’il est possible de faire fructifier un passé glorieux sans nécessairement tomber dans le piège de la nostalgie fossilisante (fustigée sur l’agité “Rumble at the Rainbo”). Qu’on se le dise, “Wig Out at Jagbags” constitue la première vraie bonne surprise de l’année 2014.
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