« On devrait faire un disque ensemble ». Tout a commencé par ce simple message, adressé à Neko Case et Laura Veirs par une K.D. Lang en quête de nouveaux défis. Le disque en question, le voici, réunion au sommet de trois artistes féminines farouchement indépendantes, dont les parcours individuels forcent depuis longtemps le respect. L’addition de talents reconnus n’est toutefois pas la garantie d’une collaboration réussie, aussi redoutions-nous que cette bonne idée ne se solde par un énième side-project sans grand intérêt. C’était bien mal connaître le niveau d’exigence de ce trio de « songwritrices » aux tempéraments affirmés, qui ont au contraire su mettre leurs immenses qualités individuelles au service d’un véritable projet d’équipe.
La complémentarité dont les filles font preuve dès les premiers accords d' »Atomic Number » suffit à dissiper les doutes quand au bien fondé de leur démarche. On y entend distinctement le travail d’un groupe en osmose totale, faisant se confondre naturellement les voix et les styles, bien loin d’un empilement sans queue ni tête de compétences disparates. Sur le plan de l’écriture, c’est une Laura Veirs particulièrement inspirée qui se taille la part du lion, dans un registre pop lumineux sur un « Best Kept Secret » taillé pour le succès radiophonique, ou dans une veine plus folk le temps d’un vibrant hommage à l’oubliée Judee Sill (« Song for Judee »). Ses deux comparses ne sont toutefois pas en reste, Neko Case prenant par exemple les rênes sur l’irrésistible « Delirium » ou sur le boisé « Behind the Armory », pendant que son aînée appose sa griffe rétro-romantique sur « Blue Fires » ou « Honey and Smoke ». Servi par les arrangements aux petits oignons du mari de Laura Veirs, le producteur Tucker Martine (My Morning Jacket, The Decemberists, Beth Orton…), ce « supergroupe » du songwriting féminin livre un premier album proche de la perfection. Nuancé, harmonieux et tout simplement brillant, « Case/Lang/Veirs » résistera à l’épreuve du temps.