Bruit Noir – II/III

Le second album  de Bruit Noir survient alors que l’époque s’avère une fois des plus navrantes. On aimerait reprendre doucement espoir mais les premières minutes de “II/III” nous plongent en plein milieu d’un field recording captant le quotidien de la ligne 9 du métro parisien (un “accident voyageur” a-t-il eu lieu ?) Mais alors qu’on commence à apprécier cet enregistrement primaire, on entend un premier cri de désespoir avec “Le Succès”, où Pascal Bouaziz et Jean-Michel Pirès semblent plus que jamais remontés contre la connerie, contre notre ‘époque, contre nous aussi, probablement.

« Encore un album pour que dalle », « Paris, capitale de la mode, ville de merde », « L’Europe, c’était une belle idée, enfin c’est ce qu’on m’a dit de penser » : l’ambiance n’est pas vraiment à la communion, les paroles nous prennent à la gorge pour ne plus la relâcher, même si, par moments, on y distingue de l’humour et surtout beaucoup d’humanité venant nous cueillir au moment où on s’y attend le moins. Les compositions, répétitives, ressemblent à du Big Black sans les guitares. Une orchestration quasiment brute qui nous laisse au bord de l’épuisement, à genoux. La beauté est rugueuse, la noirceur est de mise, on écoute ce disque les larmes aux yeux en repensant à ceux qui semblent à jamais perdus.

Mais alors qu’on en était venu à se mettre en position latérale de sécurité sous la table, une composition presque aérienne surgit pour nous prendre par la main. Le morceau, le dernier de l’album, s’appelle « Partir », il donne l’impression d’être la fin et paradoxalement on se surprend à imaginer un hypothétique demain. Il ne nous en faut pas plus pour imaginer le prochain album de Bruit Noir comme une prolongation magnifique de ce titre, fragile souffle d’espoir après cette confrontation aussi éprouvante que nécessaire.