À Dada sur la chanson française, quand elle trotte elle fait des petits pets sucrés.
Quelques chanceux sont abonnés à la mailing list d’Oso el roTO (los emes del oso) et reçoivent régulièrement des nouvelles de la contre-industrie discographique de France et d’ailleurs. On les lit autant sinon plus pour la prose détraquée que pour les infos qu’elles contiennent. La promo de ce disque est de cet acabit-cagibi-là. Il faut du courage et une certaine inconscience pour se glisser dans ces textes et cette musique (voire ce dossier de presse d’envergure balzacienne). À côté, Arlt (“Soleil Enculé”) c’est Victor Hugo et Mocke (“Parle Grand Canard”) papa Haydn. Antoine Loyer, Mégalodons malades et Bégayer prennent la chanson et la musique tellement au sérieux qu’ils dynamitent SYSTÉMATIQUEMENT toute tentative de faire des phrases ou du joli. La poésie (celle de Céline, Perec, Queneau et… Bonnefoy !) et la beauté n’en sont pas pour autant absentes au contraire mais c’est brut, rêche, naïf et bancal.
Il faut alors retrouver toute la disponibilité de l’enfance pour se laisser happer par ces éclats poétiques brut de décoffrage. Textes récupérés dans les poubelles d’un atelier d’écriture pour enfants (authentique !), split album sur lequel les uns participent (ou massacrent) les autres. L’ensemble vocal féminin équipé de petits violons, Mégalodons malades, et Bégayer, proto-rock (motocrotte ?) copulent donc musicalement avec Antoine Loyer (très jolie souple guitare savante et savonneuse). Ça donne des chansons variées, de la musique folklorique éthylique (l’album est sorti sur le label Gluck comme la bière et le compositeur), orientalisante et sentant fortement sa belgitude au sens large (des ex-colonisés Konono n°1 aux artisans expatriés et luthiers amateurs tels McCloud Zicmuse). Quelquefois on est aussi dans des remontées acides-amères médiévalistes (on pense aux intermèdes musico-ludiques de Rohmer dans Perceval le Gallois) ou une chanson française en roue libre à la Fontaine et Areski. Rock berbère gnawa aboyant, jazz déboité, collages d’émissions parasites : bref un beau bordel dans le folklore de la zone mondiale.
C’est pas toujours évident à écouter mais au moment où Katerine fait figure de génie surréaliste, où Arlt frappe gentiment à la porte du succès, ce trio à Dada sur la pissotière-bidet de qui vous savez nous nettoie les oreilles, et les yeux, au Paic Citron.
On aime alors se perdre et se retrouver dans ces chansons aux confins de la chanson, de la facilité et de l’inconfort. Retrouver la magie de l’enfance et de ses collages avec les techniques d’anguilles des faux-vrais mafieux (d’ailleurs, « TOUT est vrai ! », comme le faisait dire Vecchiali à ses Femmes Femmes). On se souvient d’un Appel prophétique qu’on se refourguait, il y a quelques années, avant les caténaires arrachées, sous le manteau.
« La perspective de former des gangs n’est pas pour nous effrayer ; celle de passer pour une mafia nous amuse plutôt. »
Certains ont pris parti. Cela se passe entre la Belgique et Chambéry.
Avec l’aide de Johanna D, qui, à cette minute, déclare qu’un Français sera bien content d’avoir trouvé du travail.
“Sauce chien et la guitare au poireau” est sorti le 22 janvier 2021 chez Gluck et Le Saule.
Face A : Antoine Loyer & Mégalodons malades
Patate (dame-jeanne de génépi)
Le petit Antoine
Morgane
Rituel Mafieux (avec Bégayer)
Sauce Chien (avec Bégayer)
Penchés
Avant la musique
Face B : Bégayer
Il y a d’autres chiens rasés
La petite fille du moderne
Le consentement
Selle de faon (avec Antoine Loyer & Mégalodons malades)
Nevena (Antoine Loyer et Loup Uberto)
La pointe d’une caillasse est une lance