Si Peter Kember a pu sublimer quelques disques de Panda Bear, MGMT ou Dean and Britta par son travail de production tenant de l’orfèvrerie, il serait injuste de négliger son travail de compositeur en solo. La sortie de “All Things Being Equal” en juin dernier nous a donné une nouvelle preuve de sa grande qualité, près de 30 ans après l’immense “Spectrum”, une messe lysergique qui a marqué toute une génération de mélomanes amateurs de plaisirs opiacés. Et ce n’est pas la lente procession rythmique des synthétiseurs bourdonnants de “I Can See Light Bend” qui viendra nous contredire.
“All Things Being Equal” démarre nonchalamment sur la cadence d’une boite à rythmes improbable. Les mélodies enfantines et cosmiques de “Just a Little Piece of Me” sont chantées doucement par Noah Lennox, convoquant ainsi un crossover entre Panda Bear et Spacemen 3, l’ancien groupe cultissime de Kember. Puisqu’on parle de guests, il faut noter aussi la basse de Britta Phillips, monstrueuse comme jamais sur les pulsations électroniques de “I Feel a Change Coming On”. Entre ces deux titres, l’auditeur trouvera diverses sonorités méditatives qui laisseront dans un état proche de l’hébétude, comme sur les 6 minutes et 25 secondes du mantra hallucinogène “Spinning Coins and Wishing on Clovers”.
Peter Kember joue les oracles électroniques comme jamais, et il est difficile de ne pas se perdre dans les psychédélisme dur de “Tawkin Tekno” qui croise les rythmiques motorik et les vocoders de Kraftwerk avec les synthés minimalistes et punk de Suicide. On quitte ce disque-monde avec l’impression d’avoir subi les effets de la drogue sans avoir inhalé la moindre vapeur de hash. Sans craindre d’exagérer, on peut parler de chef-d’œuvre.