On garde toujours une étrange fascination pour la discographie de Charlie Looker. Il faut d’abord se souvenir de “Dream Seeds” d’Extra Life et de sa terrible conclusion – ceux qui n’en font pas encore des cauchemars la nuit peuvent nous jeter la première pierre. Il y a eu ensuite son autre projet Psalm Zero, dont la musique mélange allégrement synthétiseurs sombres, riffs saturés et guitares mélodieuses. Les titres ont été un temps composés avec le guitariste de black metal Andrew Hock, avant que ce dernier ne soit renvoyé du groupe pour une sordide histoire d’agression sexuelle. Désormais seul à la barre, Charlie Looker continue de sortir des disques de Psalm Zero, dont le dernier, “Sparta”, est arrivé jusqu’à nos oreilles au début du mois de mars. On y retrouve ses inflexions vocales qui mélangent les chants médiévaux avec la tessiture de Morrissey, et un jour, il faudra bien rendre hommage à ce grand écart qui défie les derniers bastions du bon goût.
Le fan de pop gracile pourrait prendre peur à l’écoute de ces distorsions métalliques entendues dès les premières notes de “Open Wound”. Mais ne pas s’aventurer dans cette musique serait passer à côté de l’immense talent d’écriture de Charlie Looker. On se souvient encore de son passage au Centquatre, il y a quatre ans, lors d’une soirée en hommage à New York, où il interprétait seul avec une guitare acoustique certains de ses titres les plus terrifiants entre deux sets de Lee Ranaldo, Dominique Ponty, Dälek et Tyondai Braxton. Accords folk que l’on retrouve sur l’immense “Animal Outside”, où le mariage réussi entre les mélodies boisées, les synthétiseurs 80’s, une basse que n’aurait pas reniée Peter Hook et des guitares très heavy se révèlent dans ce chef-d’œuvre versatile. Charlie Looker joue en groupe, en power trio pour être tout à fait précis, ça s’entend et ça fait plaisir à écouter.
Il y aurait aussi tant à dire sur le conclusif “A Pill”, son démarrage avec un arpège dramatique, sa batterie calme mais annonçant néanmoins la tempête à venir, ses claviers sombres et ses power-chords énervés qui surviennent au bout de deux minutes. On se contentera de l’écouter en boucle en cas de grosse fatigue. L’interprétation de Charlie Looker – et aussi de Lingua Ignota qui réveille l’avant-garde de Diamanda Galás sur “Return To Stone’ – demeure toujours aussi impériale au milieu de ces distorsions. C’est bien là toute sa force, rester inébranlable au milieu du chaos.
Open Wound
Sparta
The Last Faith
No Victim
Return to Stone (feat. Lingua Ignota)
Animal Outside
Shibboleth
A Pill