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Disques

Raretés confinées (10) : “Pour qui sonne le tilt”, album d’Arnaud Michniak

Ce confinement est pour beaucoup d’entre nous l’occasion de nous replonger dans quelques disques obscurs et oubliés. Aujourd’hui, l’album autoproduit “Pour qui sonne le tilt” d’Arnaud Michniak (2012).

« J’hésite entre l’enfant et l’adulte, entre partir et renaître»

Deux ans après le dernier épisode des aventures de son duo avec Damien Bétous, Programme (“Agent réel”, 2010), Arnaud Michniak revient sous son seul patronyme avec un 33-tours vinyle sorti en catimini, comme le seront toutes ses œuvres suivantes : ni label, ni tournée, ni promo, le dénuement est désormais total, voulu sans doute, assumé de toute façon. L’absence de moyens (« enregistré à l’atelier et au nid, mixé à la trappe » est-il à peine écrit sur l’étiquette du rond central) se fait ressentir dans le son du disque, très éloigné des cathédrales soniques, pleines d’électronique, de samples et de fureur, du duo destructeur. Dans un objet finalement accueillant, une musique construite sur des guitares fragiles et des pianos tranquilles surgit et donne à l’ensemble quelque chose d’une douceur inédite.

La voix d’Arnaud Michniak se fait proche, elle susurre presque à notre oreille, est tentée par la mélodie, y résiste un peu. Les paroles, surtout, laissent échapper des sentiments inédits qu’on peut identifier comme de la nostalgie : “Le Grand Plan” rappelle ce que le musicien a peut-être ressenti quand il jouait alors en groupe (Diabologum ?), sur des scènes trop grandes pour lui ; “La Lune nous voit” évoque l’enfance, d’“Un caillou dans la poche” émane une certaine mélancolie inhabituelle ; “Sans notice” dégage un parfum de sensualité par son rapport aux éléments ; l’auditeur est même invité dans l’intimité et peut cartographier son environnement matériel dans “Mon bureau”, petite ritournelle étrange et entêtante.

Le disque, sans doute construit en réaction à la période radicale qu’Arnaud Michniak venait de traverser pendant plus de dix ans, se pose dans l’instant présent, presque une accalmie, et va même jusqu’à esquisser subrepticement une définition du bonheur, rien que ça : « Le bonheur c’est un hold-up… » (“Pour qui sonne le tilt”). Au bout du chemin, les nuages reprennent leur place dans ce ciel étrangement dégagé : c’est le tunnel sombre de “Tandis que” qui clôt l’album sur une note colérique et violente, un constat de solitude qui va sous-tendre la suite de l’œuvre, et qui met une première pelletée de terre sur ce qui reste à ce jour comme les chansons (le terme est quasi adéquat) les plus lumineuses du Toulousain. Sur cette pochette grand format aux couleurs chaudes, il y a la plage, le soleil et la mer, un journal dans la main. Et sous le chapeau de paille, il a l’air de faire bon. Enfin.

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