Le duo Mi and L’Au continue son parcours singulier, entamé il y a un peu plus de dix ans, ponctué entre autres du très beau “If Beauty Is a Crime” (2012). Mi(ra Romantschuk) et Lau(rent Leclere) ont traversé bien des épreuves pour parvenir à ce disque, la maladie les a frappés tous les deux, et c’est donc dans ce contexte certainement difficile pour les deux musiciens qu’a émergé ce disque. Il aurait pu être bien des choses, plombant, pesant, mais c’est au contraire en allant au plus simple, au plus honnête que Mi and L’Au livre son plus bel album.
Il n’y a aucun superflu sur ce disque, mais le duo a su magnifier ce dénuement pour en faire une force, faire ressortir les émotions en les portant par de très claires mélodies, sur une ligne de guitare, un air de piano et la voix de Mira, qui atteint ici des sommets. Délicate et incroyablement juste, elle pose la mélancolie qui sied aux chansons, les incarne tout en les laissant nimbées d’une aura de mystère : à part sur “A Lskling a lskling” (et encore c’est léger), c’est toujours crue et directe qu’on reçoit les mots, sans effet aucun. Que ce soit sur quelques notes de piano égrénées doucement (“Red River”, “Vem Bryr Sig”, ) ou une ligne de guitare acoustique (“Bound”, Falling”, “Sleep Now Little One”, “Under My Shoe” à l’inflexion jazz qui effleure), Mi and L’Au séduisent dans le dénuement, ayant fait le choix de laisser les mélodies et le chant au tout premier plan. Il n’y a guère que “Ticket” qui dispose d’enluminures, là encore très légères (des cordes), mais suffisamment perceptibles pour amener le morceau un peu plus loin, un peu plus haut encore sans perdre de la pudeur qui habille le disque. Celui-ci s’apprécie d’autant plus qu’on lui consacre l’attention qu’il mérite, et c’est à ce modeste prix qu’on goûte à un disque aussi beau que profond, qui concilie comme peu le dénuement avec le raffinement.