Comme c’est bon de le retrouver. Extraballe, un des rares groupes français capables d’être signés par Elektra à l’aube des eighties, et qui avait disséminé sur une poignée d’albums et de 45 tours une certaine idée de l’élégance rock et des mélodies tout en raffinement, nous avait laissés en carafe depuis quelques années. Que devenait Jean Jovenet, chanteur/guitariste, compositeur principal du groupe ? On l’avait retrouvé en 2004 avec Fuzz Townshend pour le projet Interfaith, au croisement du Velvet Underground et des sonorités électroniques. Jean Jovenet avait encore plusieurs cartes dans sa manche, et non des moindres.
Revenu de tout, sauf de lui-même, il assène sur cet album de la renaissance une pop aux influences lettrées. Des morceaux où l’ombre de Keith Richards se pose sur des mélodies irrésistibles à la Flamin’ Groovies de la grande époque (« Meteor Crater », « Liquid Gold »). Le ton est grave, les mélodies mid-tempo font largement mouche : « The Bardo States », « The Wrekrage of Time » sont des perles diablement bien ciselées, où le jeu de guitare est particulièrement éblouissant.
L’album baigne dans un climat lourd et fascinant, peu éloigné de l’univers merveilleusement décadent des Only Ones. Si l’attente fut longue, elle en valait la peine : le nouvel Extraballe poursuit cette recherche d’un pont entre tradition rock’n’rollienne et modernité, où le travail des sons – réalisé notamment par le sorcier sonore Dave Pemberton – n’est pas sans évoquer les productions de Beck ou de Trent Reznor. « Cool Junkie » reste à mon sens le pinacle de cet album, une mélodie velvetienne et lumineuse, un clavier éthéré et une douce lumière qui ressort de cette musique. Et la force de « Tightness of the Heart », petit bijou pop surgissant des enceintes sans prévenir, enfonce leclou et assène cette vérité : Extraballe nous est revenu, et les hostilités reprennent. Nous voilà revenus dans la Grosse Pomme, enfin.