CRYSTAL CASTLES – S/T
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Devinette (et jeu de mot presque parfait) : qu’est-ce qui crisse, qui talque, qui casse et qui feule ? Réponse : Alice Glass, la chanteuse des Crystal Castles, au nom
(pseudo ?) très carrollien comme d’ailleurs son Pygmalion acolyte Ethan Kath (de Cheshire ?). Le premier album du duo s’apparentait sans coup férir à une longue chute dans le terrier du lapin blanc. Cette électro revêche et furibarde conjuguée à une punk-attitude en veux-tu en voilà (« moi pas montrer visage, moi zombie ») accouchait de pépites salies jetées à la tête de l’auditeur aussi malmené que le pauvre nourrisson de la Duchesse. C’était sans compter sur le proprement fabuleux « Courtship Dating » scandé par des hurlements et pourtant réflexif, sensible, dansant, mature, pour tout dire génial. Il y avait donc le meilleur et le pire à craindre de Crystal Castles. Rassurons-nous, le miroir est traversé, et c’est le meilleur qui gagne. Kath, mentor mutique, s’est rendu compte que le registre de Glass était bien plus large que les couinements éructés de leur coup d’essai. Une fois de plus, le disque est sans titre à la façon d’un Led Zep, signe qu’un son unique se cultive ici. La voix d’Alice n’hésite plus maintenant à faire le grand écart entre le caressant « Celestica », audible par votre petite cousine pré-adolescente, et « Doe Deer », sorte de « Tame » acid-noisy-trash qui révulse à la première écoute avant de convaincre les suivantes comme la face obscure du bonbon qui l’a précédé (un « baiser en fil de fer barbelé » pour citer les Jesus & Mary Chain, autres vilains garçons qui ne répugnaient pas à des douceurs entre les jambes). « Crystal Castles II » impressionne particulièrement quand il apprivoise les stridences au milieu du très pop « Pap Smear », ou sur l’incroyable « I Am Made of Chalk » entamé comme une baston d’arcade avant de flotter, baleine ataraxique, au milieu d’une berceuse-océan. Rajoutons à cela deux classiques à danser le poing brandi (« Baptism ») ou l’âme vague (« Suffocation »), et l’on obtient un album plein, gorgé jusqu’à plus soif, électrique, vibrant, tranché, à peine encore un peu pataud dans ses recharges d’accu (une poignée d’instrus frisant le neutre) et ses admirations faciles (la vilaine guitare Prodigy de « Birds »). Qu’importe, (II) fait bouger, rêver, peur, froid, chaud, et même bander. C’est énorme (euh, métaphore hein ?) et quasi-capital.
Christophe Despaux
A lire également, sur Crystal Castles :
la chronique de « s/t » (2008)
Fainting Spells
Celestica
Doe Deer
Baptism
Year of Silence
Empathy
Suffocation
Violent Dreams
Vietnam
Birds
Pap Smear
Not in Love
Intimate
I Am Made of Chalk