TUE-LOUP – Le Goût Du Bonbon
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Après une virée en solo en début d’année, le chanteur Xavier Plumas nous revient avec sa formation originelle. Tue-Loup, groupe ô combien attachant, a toujours été encensé sur ce site et à juste titre. Ce disque ne fera que prolonger la lune de miel. Avec une discographie d’une rare cohérence dans le paysage français, un premier album inépuisable de beauté, "La Bancale", titre annonciateur, le groupe n’a cessé de prendre des risques, d’être à un point de convergence assez unique. "Le Goût du bonbon" est peut-être arrivé à un degré de liberté jamais atteint à ce jour pour la formation. Accompagné par Rom Liteau, un slameur qui avait déjà enflammé certains titres, et de Thomas Belhom batteur en vadrouille entre les Tindersticks, Calexico et autres expériences singulières, la formation hybride se retrouve sur "Le Goût du bonbon". Entre guitares acérées, arpèges délicats et accords dissonants, la belle mécanique s’installe rapidement et s’ouvre avec "Le Camping", hymne d’un poète qui s’emmerde entre la chenille urticante et les averses à répétition, jusqu’à vomir une saison pourrie d’avance. Le phrasé assuré, crachant des mots écorchés, Rom Liteau impulse à l’album, dans un contexte champêtre, niché entre un poulailler et un tas d’azote, une force poétique rarement rencontrée qu’on retrouve aussi chez Pascal Bouaziz de Mendelson ou Manset. Entre les déferlantes de Liteau, Plumas pose sa voix entre reprise du folklore bigouden et versets bashunguiens avec toujours autant de chaleur et d’affliction. Les deux voix se mêlent sur plusieurs duos qui fonctionnent assez bien et viennent boucler ce disque sur une fenêtre ouverte. "Il ne pleut plus", moment d’attention, d’attente où "le temps ne fait rien à l’affaire, bien au contraire" paraît une chanson immobile, sur un fil, un brin apaisée et repue de ce parcours méandreux. Tout homme qui parle est hanté par la nuit, sans être nécessairement bavard. Tue-Loup, formation à la vision bressonienne, tournant autour du pot, fouillant dans les franges, s’obstine à décrire des situations dans un clair-obscur que chacun peut prolonger comme il l’entend et en faire un album protéiforme. Inépuisable.
Benoit Crevits
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l’interview (2002)
la chronique de « Penya » (2002)
la chronique de « La belle inutile » (1999)
la chronique de « La Bancale » (1998)
Le Camping
Mon Vin de garde
Je ne suis queue
Aux Carpates
Dès lors
La Chanson du forban
Le Repos du cheval noir
Sonnet du trou du cul
Vladimir
Courte-pelle
Il ne pleut plus