THE FIERY FURNACES – I’m Going Away
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Voilà un album qui enchantera ceux qui regrettaient le caractère alambiqué et déconstruit des précédents albums des Fiery Furnaces. Un disque qui réconfortera ceux qui aiment qu’on caresse leurs oreilles sensibles avec des mélodies bien faites et des morceaux de 3 minutes où l’on s’y retrouve.
Car après un album expérimental lorgnant parfois du côté du métal ("Widow City"), les Friedberger se sont assurément calmés. Finis, les morceaux de 10 minutes dont on peine à repérer le début et la fin tellement ils se fondent les uns dans les autres, finis les rythmes qui changent quinze fois par morceau. Finie aussi la juxtaposition de genres comme sur "Bitter Tea", où dans un même morceau se côtoyaient un air de comptine, des sons électro propres à accompagner un jeu vidéo, et des guitares déchaînées.
Ici, les différents genres que les Fiery Furnaces exploitaient avec une distance légère et quasi ironique se retrouvent séparés, comme par une sorte de distillation qui aurait instauré plus de clarté et de calme. "I’m Going Away", la chanson-titre, verse dans le rock agressif et empressé, tandis que "Drive to Dallas" baigne dans une atmosphère de jazz alanguie. On a quelques belles incursions pop, comme sur "Ray Bouvier" ou sur "Lost at Sea", qui rappellent les morceaux pêchus et bien ficelés de "E.P.". Dans l’ensemble, c’est une ambiance légère, entre le jazz, le swing, le rockabilly et la pop qui habite cet album paisible, largement dominé par les claviers. Et même si on a quelques explosions de guitare qui viennent brouiller les pistes, comme au milieu de "Drive to Dallas" où des guitares survoltées se mêlent à tous les sons pendant quelques secondes, "I’m Going Away" s’apparente à une mer calme par rapport aux précédentes productions des Friedberger.
Alors oui, il faut reconnaître en toute bonne foi qu’il s’agit d’un album de qualité; qu’il y a une légèreté ensoleillée tout à fait appréciable; que la voix d’Eleanor se marie parfaitement avec ces différents fonds sonores tout en leur donnant du piment; qu’il y a quelques perles pop sur ce disque, comme "Ray Bouvier", et que si un groupe quelconque avait sorti cet album, on n’y trouverait rien à redire.
Mais malgré cela, si on trouvait addictive la frénésie de "Blueberry Boat", si on trouvait admirable l’art du collage que les Fiery Furnaces maniaient avec ironie et élégance, alors on ne pourra pas s’empêcher d’éprouver une pointe de déception à l’écoute de cet album.
Et si, comme c’est mon cas, on attendait des deux Friedberger qu’ils nous sortent une trouvaille, une invention inédite dans le domaine des expérimentations vaguement surréalistes, il faudra attendre les reprises de ce même album qu’Eleanor et Matthew concoctent chacun de leur côté, pour espérer être consolé. Et se dire que les Friedberger ont le droit, eux aussi, de faire de la musique comme tout le monde.
Catherine Guesde
A lire également, sur The Fiery Furnaces :
la chronique de « Widow City » (2007)
la chronique de « Bitter Tea » (2006)
I’m Going Away
Drive to Dallas
The End Is Near
Charmaine Champagne
Cut the Cake
Even in the Rain
Staring at the Steeple
Ray Bouvier
Keep Me in Dark
Lost at Sea
Cups and Punches
Take Me Round Again