LES FRÈRES NUBUCK – Disque Mineur, Fin De Règne Animal
(Sorry But Home Recordings) [site] – acheter ce disque
Comme Dionysos et Cyrz, les Frères Nubuck sont originaires de Valence, dans la Drôme. Loin de connaître le succès massif des premiers, ou même la petite renommée du second, ces deux véritables frangins (accompagnés de quatre musiciens) bricolent dans leur coin, depuis une dizaine d’années, des chansons uniques en leur genre. Sur scène, le sextette est sans conteste le plus grand groupe de rock festif dépressif de la région Rhône-Alpes (certes, il n’y a pas une énorme concurrence) ; sur disque, c’est encore autre chose, pas forcément aisé à définir. Aussi génialement titré que les précédents (deux albums et deux EP parus depuis 2003), leur nouveau méfait, "Disque mineur, fin de règne animal", confirme en tout cas le talent de Rémy Chante et Chris Gontard pour écrire en français une pop tordue, innocemment vicieuse.
Les textes grinçants et décalés, mêlant références savantes et franche trivialité, souvent plus parlés que vraiment chantés, rappellent une certaine "école Lithium", dont les Nubuck ne cachent pas qu’ils lui doivent beaucoup : pas tellement le Dominique A des débuts, mais plutôt Mendelson, Jérôme Minière, Oslo Telescopic, Diabologum ou Programme. Avec en prime un humour potache ("Pascal Souffrant") qui renvoie au plus ou moins recommandable "rock alternatif" français d’il y a vingt et quelques années. Heureusement, ici, les ambitions musicales sont tout autres.
A l’évidence, Chris et Rémy ont écouté – et écoutent toujours – des milliers de disques. Un certain rock lo-fi américain des années 90 les a suffisamment marqués pour qu’ils rendent hommage en 2009 à Lisa Germano sur le morceau du même nom. Une légèreté très sixties baigne par ailleurs des titres comme "Seconde main" ou "OK Corral", rappelant les dandys clermontois de La Position du tireur couché. Si les mélodies ne sont pas toutes inoubliables, chaque chanson, à l’image de leurs visuels, est arrangée avec beaucoup de soin et d’idées : trompette, saxophone, violoncelle, piano, banjo, choeurs, et un foisonnement de samples (Yma Sumac, Miriam Makeba, Bernard Herrmann…) qui laisse à penser que les frangins ont dévalisé quelques médiathèques municipales. Sur "Fantômas est en ville", sans doute le sommet du disque, c’est carrément une section de cuivres qui vient mettre en relief un texte ou le désespoir et l’absurde se livrent un duel avec des épées en plastique.
"Disque mineur", peut-être, mais des comme ça on veut bien en recevoir plus souvent.
Vincent Arquillière
A lire également, sur les Frères Nubuck :
La chronique de l’album "Chaque vivant est un mort en puissance" (2006)
L’Oeil de Moscou
In meiner garage (wie Ribery)
L’Olympe à tes pieds
Seconde main
OK Corral
Fantômas est en ville
Un jour en mission
Constance
Pascal Souffrant
Pour la survie de l’espèce
Lisa Germano
Déterrer les Zimmerman
Bonus tracks MP3 :
Sous le signe du tigre
Preuves de jeunesse
Solitaire & branleur
Beau matin