FOREST CITY LOVERS, THE PHONEMES – Chez Arnaud, Paris, Le 1er Mai 2009
C’est certes une vision un peu réductrice, pour qui a fréquenté de sombres caves ou des embarcations plus ou moins aux normes de Paris ou d’ailleurs pour applaudir quelque obscur combo en compagnie de douze autres binoclards, mais un concert en appartement, ça reste un concert, à part que tu peux apporter tes bières au lieu de les acheter au comptoir.
Mais bon, c’est très sympathique quand même, un concert en appartement, d’ailleurs les groupes qui en font sont eux-mêmes sympas (mais méfions-nous, le succès de la formule va forcément amener rapidement des groupes antipathiques à s’y mettre), ils discutent le coup avec vous après ou même avant le concert en mangeant des Pringles™. C’est un super concept, même qu’il abolit la distance entre le spectacteur et l’artiste, et que ça doit bien vouloir dire quelque chose sur la société, sur l’homme, sur nous quoi, surtout en ces temps frileux.
Cela dit, je vais d’autant moins jouer les blasés que j’étais ravi de pouvoir découvrir en live les chansons de Forest City Lovers, auteurs d’un album fort joli, "Haunting Moon Sinking", que j’ai pas mal écouté l’an passé, album que j’ai ainsi pu acheter, en compagnie de son grand frère, de la main à la main, histoire de commencer à rentrer dans le rang à quelques jours du vote de la loi Hadopi (mais permettez-moi, madame la Ministre, de persister à me demander comment j’aurais connu ce disque si je ne l’avais pas téléchargé par hasard).
Rendons donc grâce à Arnaud, par ailleurs membre du très fruité groupe parisien Bob Robot Présente, d’accueillir les Canadiens dans son appartement, qui leur sert en outre de point d’attache lors de l’escale parisienne de leur tournée européenne (trois dates : un concert de poche pour la Blogothèque, un concert d’appartement chez Arnaud, donc, et une date de prestige dans une grande salle, le Pop’In).
Au moment où l’on arrive dans l’appartement, une petite assistance discute, tranquillement. On se croirait presque à un apéro de fin de jour férié entre amis. Accueil chaleureux et sans chichi. Mais toujours pas de couscous.
Le double-living est coupé en deux par un grand rideau blanc, derrière lequel les groupes s’affairent pour d’ultimes répétitions. Les groupes, car c’est The Phonemes, à savoir Magali, qui ouvrira pour les Forest City Lovers, avec ceux-ci en guise de backing band. Une fois les derniers détails mis au point, les artistes s’égaient en chaussettes parmi le public, maintenant plus nombreux.
Puis le spectacle commence. J’ignorais tout de Magali Meagher avant de découvrir cette pétulante Canadienne sur scène. Renseignements pris, il se trouve que la jeune fille joue de la batterie à l’occasion avec Daniel Johnston, a tourné avec les Hidden Cameras et a enregistré son EP sous la houlette d’Efrim Menuk, de Godspeed). Musicalement, Magali fait du folk avec un joli talent mélodique et quelques chouettes trouvailles, comme ce "Pain perdu" dont on reprendrait bien une tranche. Du folk sur des a priori basiques, donc, mais on sent qu’elle en a sous le pied pour s’aventurer sur des terres plus personnelles. A suivre sur un disque à venir en 2009 ?
Après une courte pause, ses accompagnateurs d’un soir lui succèdent, soit Kat Burns au chant et à la guitare, Christian Ingelevics à la caisse claire, à la banane, au triangle et à la toute petite cymbale, et Kyle Donnelly à la double basse et à la (au moins) double barbe. Un peu moins à l’aise en français que sa compatriote, Kat n’en introduit pas moins dans un français approximatif chacun des morceaux parmi la dizaine que joue le groupe ce soir. Morceaux qui n’ont l’air de rien, mais qui font mouche, emmenés par la douce voix de la chanteuse.
Pour ses débuts à la contrebasse, Kyle se débrouille comme un chef, tandis que son acolyte compense les limitations imposées à sa caisse claire par le contexte et le voisinage par quelques petits coups de triangle ou de toute petite cymbale (mais comment ça peut bien s’appeler ?). On reconnaît quelques titres du dernier album, parmi lesquels les deux "tubes" jumeaux "Don’t Go" et "Country Road", et puis c’est fini. Après un court moment de silence, "Alone Again Or" de Love démarre, et on se croirait presque à un apéro de fin de jour férié entre amis de bon goût. Merci Arnaud, merci Magali, merci Kat, merci Kyle et merci Christian.
Guillaume