JAMES YORKSTON – When the Haar Rolls In
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Si les Inuits ont soi-disant à leur disposition plus d’une centaine de mots pour désigner la neige, alors les Ecossais doivent en avoir également un certain nombre pour désigner ce que nous appelons paresseusement le brouillard. Le (brouill-)haar qu’évoque le titre du nouvel album de James Yorkston, c’est une fine brume qui monte au printemps de la Mer du Nord vers les terres orientales de l’Ecosse, par exemple le comté de Fife, dont est originaire le songwriter. L’image est évocatrice et conviendra naturellement à la musique de l’Ecossais.
La voix de James, douce, grave, un sur un ton mi-parlé, mi-chanté – on se demande même parfois s’il n’est pas un peu ivre, tiens -, semble nous chuchoter dans le creux de l’oreille, comme sur le morceau-titre. La musique de l’Ecossais provoque une douce torpeur contemplative : pas de révolution sonore ou de branle-bas de combat sur ce disque – les derniers exploits soniques de son compère Kenny Anderson sur le dernier King Creosote sont loin. Aux risques de la redite en moins bien, qu’il n’avait pas totalement contournés avec "The Year of the Leopard", Yorkston a donc répliqué par un pas supplémentaire vers le raffinement ultime, le souci du détail, de l’imbrication des strates fines d’instruments autour de sa voix et de ses textes tragico-mélancoliques. C’est bien beau, mais cela ne suffirait pas s’il n’y avait pas en contrepoint les mélodies en tortillons qui s’agrippent comme une clématite sur le tronc moussu de la musique. Pour être honnête, ça ne marche pas à tous les coups – "When the Haar Rolls In", le morceau-titre, bénédiction ou pensum selon l’humeur qui prévaut lors de son écoute – mais quand ça marche, ça marche magnifiquement : l’étoilé "B’s Jig", l’obsessionnel "Tortoise Regrets Hare" et sa très efficace voix doublée, "Temptation", "Queen of Spain", peut-être un peu appuyé celui-là, "Summer’s Not the Same Without You" basique mais à pleurer, ou encore, "Midnight Feast", une reprise dont le refrain dramatique prend aux tripes et sort agréablement du ronron. Avec ce très bel album, Yorkston continue donc son petit bonhomme de chemin, certes à un train de sénateur. Mais rien ne sert de courir…
Guillaume
A lire également, sur James Yorkston and the Athletes :
la chronique de « Just Beyond The River » (2004)
la chronique de « Moving Up Country » (2002)
B’s Jig
Tortoise Regrets Hare
Temptation
When the Haar Rolls In
Queen of Spain
Midnight Feast
Would You Have Me Born With Wooden Eyes?
Summer’s Not the Same Without You
The Capture of the Horse