KING CREOSOTE – Bombshell
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Les aléas de notre microcosme musical pourtant mondialisé à grand coup de blogs et de peer-to-peer font que Kenny Anderson, le barbu caché derrière le sobriquet de King Creosote, demeure pratiquement inconnu de ce côté-ci de la Manche. L’Écossais a loupé le coche une première fois quand le "New Acoustic Movement", sympathique et bref engouement médiatique de 2001 pour la musique boisée, avait mis en avant fugitivement James Yorkston, dont il est proche (au sein du collectif Fence, qu’il a fondé). Là, il est en train de le louper une deuxième fois, malgré un attrait plus durable du public pour le folk, une barbe comme Devendra et les Düne, et des disques bien moins indigents que les plus récents de ces derniers.
A titre personnel, j’aurais pu passer à côté des oeuvres du garçon si sa singulière reprise du "Grace" de Jeff Buckley, sur l’album consacré à des reprises de Jeff et son père ne m’avait pas mis la puce à l’oreille. Sur cet album de reprises plus qu’honorable, la barre était assez haute, et King Creosote sortait du lot.
Ensuite, il y eut l’épatant "KC Rules Ok", album inépuisable à un tel point que, malgré deux ou trois titres un peu faciles, je ne l’ai toujours pas épuisé. Et pourtant, j’ai insisté, même pas distrait par la pléthore de sorties en CDR qu’affiche King Creosote au compteur (plus d’une vingtaine ; même notre prolifique Pierre national est dépassé).
Deux ans plus tard, donc, "Bombshell" (tout un programme). Ce n’est pas exactement, à la première écoute, l’album qu’on aurait pu attendre en guise de successeur aux plus tortueux "KC Rules OK" et "Kenny and Beth’s Musakal Boatrides" : après un introductif et élégiaque "Leslie", le (trop ?) tubesque "You’ve No Clue Do You", "At the W.A.L." (qui couve, qui couve… avant d’exploser, presque héroïque) ou même "Spystick" sont des chansons directes et impérieuses. Entre ces coups de poignard (relatifs, mais quand même), Kenny peut s’autoriser le bonhomme "Cowardly Custard" ou les très subtils "Home in a Sentence", "Admiral" et "Church as Witness". L’album se referme comme il s’est ouvert, par un morceau poignant et sobre. Une palette large, des arrangements subtils mais pas paupéristes pour un sou, des mélodies, une voix inimitable pour leur donner vie : comme son prédécesseur, "Bombshell" est un de ces albums extrêmement attachants qui, certes, ne changent pas une vie, mais savent l’accompagner au fil des jours. Et Kenny Anderson, s’éloignant avec aisance de l’ornière "indie folk DIY", s’affirme comme un grand songwriter. Ne lui manque qu’une reconnaissance publique méritée.
Guillaume
A lire également :
chronique de "Dream Brother – The Songs of Tim + Jeff Buckley" (2005)
chronique de "Bootprints" (2005)
Leslie
Home in a Sentence
You’ve No Clue Do You
Cowardly Custard
Church as Witness
There’s None of That
Nooks
Now Drop Your Bombshell
Admiral
Cockle Shell
Spystick
At the W.A.L.
And the Racket They Made