MÚM
C’est avec une mine franchement tirée que nous reçoit Örvar þóreyjarson Smárason, un des membres fondateurs de Múm. Il s’en excuse d’ailleurs très gentiment, expliquant qu’il a passé la matinée à arpenter les rues de notre belle capitale. Il sortira petit à petit de sa coquille, tout en gardant une attitude attachante de doux rêveur très « peace », pour nous décrire la réalisation du nouvel album par une équipe recomposée, dévoilant aussi son goût pour l’écriture et un intérêt singulier pour la rhubarbe.
Il ne reste maintenant que la moitié du groupe des débuts et nous n’avions pas de nouvelles depuis quelque temps. Est-ce que vous avez cru à un moment que c’en était fini de Múm ?
En fait, Gunmar et moi étions le groupe originel, pendant deux ans. C’est après que les deux jumelles nous ont rejoints. Nous avons juste fait un break d’environ un an, pour nous consacrer à d’autres choses. J’ai fait une école de cinéma pendant un an. Ça nous a fait du bien de faire une pause, mais je ne crois pas que Múm s’arrêtera tant que nous n’en aurons pas envie. Et maintenant nous sommes sept.
Vous avez joué à Londres hier. Ça s’est bien passé ?
Très bien, nous avons joué au Museum of Garden History, un très beau lieu, avec des outils de jardinage anciens, des vieilles brouettes…. C’était un concert privé, en petit comité uniquement sur invitation, que l’on pouvait gagner en participant à un tirage au sort sur Internet. Un petit concert, très agréable.
Vous avez essayé des anciens titres ? Qui chante maintenant ?
Moi-même et les trois filles. Les chansons sonnent bien sûr un peu différemment d’avant. Ca serait un peu bizarre. Et on a toujours besoin d’un peu de changement pour avancer et ne pas s’ennuyer.
Comment avez vous constitué le nouveau groupe ? Et est-ce que vous vous considérez comme un groupe d’ailleurs, étant donné que tout le monde semble avoir des side-projects ?
C’est plutôt un rassemblement à géométrie variable. Parfois nous sommes juste quatre ou cinq, en fonction de qui est disponible. Mais la plupart des membres ont déjà joué avec nous depuis longtemps. Samuli, notre batteur, a commencé à jouer avec nous en 2001. Eiríkur, le trompettiste, est sur tous les disques depuis le tout début. Olof, cela fait trois ou quatre ans…
Tout ça s’est donc fait assez naturellement, sans que cela soit particulièrement guidé par une intention de changer l’orientation musicale.
Non, ce sont juste nos amis qui vont et qui viennent. C’est la meilleure façon dont les choses peuvent se passer. Et c’est très ouvert. Parfois, si quelqu’un ne peut pas venir jouer, nous pouvons aussi le remplacer par une autre connaissance. Pour la prochaine tournée, C’est le cas pour Olof qui est enceinte maintenant.
Sans dire qu’on puisse en comprendre facilement le sens, on a l’impression que votre écriture vise plutôt à procurer des sensations, ou créer une certaine forme d’évasion. Est-ce que vous pensez pouvoir écrire des chansons qui traitent directement des sentiments humains, comme l’amour, la douleur, le chagrin…
(Etonné) Je pense que ces chansons concernent vraiment les sentiments humains. Pas exactement l’amour ou la douleur, mais des sentiments que tout le monde ressent.
Oui, elles traitent de ça, mais en fait « traiter » n’est pas le mot exact : disons qu’elles ne les décrivent pas directement.
Oui (hésitation)… Je ne vois pas pourquoi nous voudrions écrire de manière si directe. C’est plus intéressant de faire apparaître les sentiments d’une façon plus complexe. C’est juste que nous ne pouvons pas simplement dire les choses de façon aussi démonstrative, ça ne fonctionne pas avec nous.
Mais ne trouves-tu pas que le nouvel album est un peu plus direct, avec des chansons un peu plus radieuses, plus ensoleillées comme « Dancing Behind My Eyelids » ou « Marmelade Fire » pour parler des plus immédiates ?
Oui c’est vrai, il est nettement plus ensoleillé, même s’il y a deux ou trois chansons plus sombres. Et les chansons sont souvent plus directes, mais aussi plus ouvertes pour l’ajout de détails un peu étranges.
Avec « Summer Makes Good », vous étiez arrivés à une certaine extrémité, je n’irais pas jusqu’à dire noire…
(il interrompt) Crépusculaire. Quand la nuit tombe et qu’il ne fait pas encore vraiment noir !
Oui, il y avait une sorte d’austérité, alors que maintenant, on sent une volonté d’aller dans des directions différentes, et moins minimales.
Exactement. Nous n’avions pas précisément cette intention, mais en cours de route, il nous est apparu que nous ne pouvions pas faire un autre album comme « Summer Makes Good », pas tout de suite en tout cas. Peut-être plus tard. Mais d’une certaine manière, je trouve cet album plus proche de notre premier, « Yesterday Was Dramatic, But Today Is OK », qui était peut-être plus électro. Mais il y a quelque chose dans les sensations qu’ils révèlent qui relie les deux disques.
Avec un côté un peu enfantin aussi ?
Plutôt enjoué je dirais.
Oui, ça se retrouve aussi dans l’artwork, qui utilise des couleurs plus claires, et est moins abstrait.
Pour la première fois, nous ne l’avons pas réalisé nous même, mais nous avons demandé à une amie de longue date, qui nous suit depuis plus de dix ans. A ce niveau aussi, il était temps de rompre avec nos habitudes, et de s’ouvrir à quelque chose de complètement différent.
C’est elle qui a aussi réalisé la vidéo. Elle ne fait pas partie du groupe par ailleurs ?
Non, elle a son propre groupe, Seabear, qui est très bien (NDR : et dont l’album est chroniqué ici : Seabear). Je pense d’ailleurs qu’ils nous accompagneront en tournée en novembre et décembre.
Cela dit, ce qu’elle fait a aussi un côté un peu distordu ?
Oui, ça correspond à ce que je lui avais demandé, en plus d’avoir ses petits boy-scouts.