ALEXANDRE VARLET – Ciel de fête
(Fargo) [site]
Parfois il faut du temps pour s’imposer. Certains y arrivent du premier coup (Arman Méliès, Joseph d’Anvers), d’autres moins facilement (Julien Baer, Florent Marchet). Alexandre Varlet est de ceux-là. Déjà deux albums au compteur (dont « Dragueuse de fond« , en 2003) qui lui avaient permis de se mettre en orbite sans casser la baraque jusqu’à ce « Ciel de fête », son troisième opus, qui devrait enfin mettre tout le monde d’accord.
Varlet a bien fait d’attendre. Ses textes ont mûri, ses mélodies se sont ciselées, sa musique a gagné en épaisseur et en spontanéité. Bref, l’artiste va à l’essentiel avec un plaisir évident de jouer au rocker fringant et au ménestrel de haut rang. La voix nasale, un peu maniérée, est celle d’un animal meurtri qui aurait conservé ironie et panache. Derrière les états d’âme d’un beau dandy trentenaire se cachent les guitares orageuses et espiègles de Nicolas Leroux (Overhead) qui font véritablement la pluie et le beau temps sur des titres rock comme « Le Sens de l’orientation », « Montre toi », « Cours cowboy » ou « Mes yeux ». Qu’il est bon de voir Varlet se défouler ainsi avec le swing d’un Stuart Staples ou d’un Murat en transe. Mais l’homme sait aussi lever le pied et prendre le temps de susurrer des ballades bouleversantes de sagesse comme « Tutti Quanti » et « Presque monde » – sans doute les plus belles mélodies de ce disque. Sous des ciels tourmentés, la poésie de Varlet, plus directe, dessine une géographie de l’âme inédite à coups d’allégories naturalistes. La nature comme antidépresseur ? Sec et concis, sentant le bitume autant que la chlorophylle, « Ciel de fête » est un grand disque apaisé sous des dehors tempétueux. Un beau diamant noir taillé par un orfèvre en lévitation.