STEREOLAB – Fab Four Suture
(Too Pure / Beggars) [site] – acheter ce disque
Il en va de Stereolab comme de tous les groupes à la production régulière, pléthorique et relativement routinière, de The Fall (qui annonçait la couleur dès 1978 : "We dig repetition") à Herman Düne en passant par Lambchop : on a beau être fan, arrive fatalement un moment où l’on décroche. Dans le cas présent, le moment en question remonte à près de dix ans – même si j’ai vu le groupe sur scène en 2001 à… Varsovie -, ce qui fait pas mal d’épisodes manqués. Pourtant, avant même de mettre sur la platine ce nouvel album (il s’agit en fait, mais ça ne se sent pas vraiment, d’une compilation "suturant" six 45-tours, également téléchargeables), on est déjà en terrain archi-balisé : pochette technico-géométrique, titres de chansons qu’on croirait piqués à des courts-métrages expérimentaux et, en tout petit dans un coin, à côté de celui du label Too Pure, le logo très seventies qui ornait déjà leurs premières pochettes, il y a une petite quinzaine d’années.
Et comme pour dire que les grands chamboulements ne sont pas encore à l’ordre du jour, le disque s’ouvre et se clôt sur deux versions du même morceau, "Kyberneticka Babicka", un pur concentré du style Stereolab : structure répétitive tournant autour d’une poignée de notes (un do, un la, un fa… et peut-être un mi), texte réduit à quelques syllabes et phonèmes ("aaaa…", "la", ad lib), sons vintage du Moog et du Fender Rhodes. Ailleurs, Laetitia Sadier – qui cosigne toujours l’ensemble des morceaux avec le guitariste Tim Gane – chante des textes sibyllins en anglais avec un léger accent français, et parfois en français avec un accent indéfinissable ; les synthés font des bulles, des "blip" et des "pouic" ; les cuivres, très présents, semblent échappés d’une fanfare intersidérale.
Les chansons défilent, bien fichues, légères, agréables, immédiatement familières pour qui connaît un peu la musique de Stereolab, et (peut-être justement pour cette raison) rarement mémorables. Ici ou là, une mélodie se détache ("Vodiak"), une résurgence noisy fait tendre l’oreille (la fin de "Excursions…"), mais pour le reste, le groupe semble une fois de plus en pilotage automatique. Ce qui, venant d’amateurs éclairés de machines à générer des sons et de graphisme industriel, qui se disaient à leurs débuts "plus préoccupés par la quantité que par la qualité", n’est ni étonnant, ni foncièrement gênant.
Vincent Arquillière
PS – On ne saurait trop conseiller, au passage, de jeter une oreille aux mix disponibles sur le site du groupe, histoire de mesurer l’étendue des (excellents) goûts de Tim et Laetitia, de Jean-Claude Vannier à Krzysztof Komeda en passant par Ligeti et les Rita Mitsouko.
Kyberneticka Babicka Pt 1.
Interlock
Eye of the Volcano
Plastic Mile
" Get a Shot of the Refrigerator"
Visionary Road Maps
Vodiak
Whisper Pitch
Excursions into "oh, a-oh"
I Was a Sunny Rainphase
Widow Weirdo
Kyberneticka Babicka Pt 2.