ANDREW BIRD – And The Mysterious Production Of Eggs
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Il y a des disques tellement marquants qu’il ne suffit pas de les écouter en boucle, il ne suffit pas de les avoir avec soi en permanence, il ne suffit pas de connaître chacune de leurs chansons par cœur pour pouvoir les contenir. Il faut autre chose. Quelque chose d’aussi irrépressible que l’œuvre elle-même. Alors on écrit quelques mots. Tentative de thérapie pour Andrew Bird and The Mysterious Production of Eggs…
L’année dernière, "Weather Systems" intronisait notre oiseau dans la caste des songwriters de grand talent, découvrant un univers riche et éminemment personnel, le temps d’un album tout à fait remarquable. Première surprise aujourd’hui : ce nouveau chapitre ne déçoit pas, le disque n’est pas moins bon que le précédent. Déjà une belle gageure. Deuxième surprise : malgré les auto-références assumées ("Sovay" et le début de "Skin is, My" sont des échos très clairs à Weather Systems) l’album est très différent, plus dense, plus varié, plus long aussi. Enfin : une suite de surprises ininterrompues à chaque écoute et réécoutes du disque, intarissable, mystérieux et sans doute indicible, malheureusement. Et c’est là évidemment qu’est le problème. Derrière la pop douce, atmosphérique, élégante, derrière les chansons construites au millimètre, derrière l’instrumentation délicate, précise et soignée, derrière la voix limpide, angélique de Bird, c’est à l’incommunicable, à l’essence même de cette musique, trop personnelle pour être vraiment décrite, qu’on se heurte. Le triptyque d’ouverture impressionne d’emblée. "Sovay" introduit avec une douceur en demi-teintes le son classieux, cristallin du disque, avant que celui-ci ne soit pris en charge par "A Nervous Tic Motion of The Head to The Left", qui a le potentiel d’un tube, mais ne sera sans doute jamais autre chose qu’une très grande chanson. A ce stade, on se dit déjà que Andrew Bird a fait bien du chemin, qu’il a maintenant les moyens de nous faire chanter, danser même peut-être… Et puis "Fake Palindromes". Fake Palindromes" et son incroyable ouverture explosive mêlant violon et batterie, "Fake Palindromes" et son déroulement mélodique infaillible, son énergie diffuse et mélancolique. Une chanson pop parfaite que l’on peut écouter six fois par jour avec un intérêt croissant (testé pour vous) et qui risque fort de s’imposer parmi les plus grandes réussites de 2005. Après ce choc esthétique, n’importe quelle suite d’album serait apparue bien fade. Miracle, stupeur, on ne sait trop comment nommer ça : il n’en est rien. Il faut les vocalises posées comme des flocons de neige sur les cordes pincées du violon de "Measuring Cups", il faut la dynamique interne de "Opposite Day", qui contient trois chansons à elle seule, il faut la triste ironie, la fine intelligence des textes, il faut la violence subtile d’un archet, le format pop de "The Naming of Things", l’envolée sonore de "Banking on a Myth", il faut certainement bien d’autres choses encore, impossibles à identifier, pour rendre cela envisageable. Il faut, peut-être, quelque chose de surnaturel, d’impalpable, de flottant qui rend toute tentative d’explication vaine. Il faut écouter ce disque.
Jean-Charles Dufeu
Intro
Sovay
A Nervous Tic Motion Of The Head To The Left
Fake Palindromes
Measuring Cups
Banking On A Myth
Masterfade
Opposite Day
Skin Is, My
The Naming Of Things
MX Missiles
Instrumental
Tables And Chairs
The Happy Birthday Song