Jason FALKNER/CORNERSHOP – La Boule Noire, 08/02/02
Ce soir-là, les Parisiens branchés étaient allés voir Röyksopp à La Maroquinerie, voire Bobby Cohn on ne sait plus trop où. A la Boule Noire, Jason Falkner et Cornershop, espoirs d’avant-hier aux styles fort dissemblables, jouaient pour leurs fans (dont une moitié de Air, récents employeurs du premier). Un concert qui, curieusement, précédait la sortie de leurs nouveaux albums respectifs.
On se souvient que Jason Falkner avait écrit, interprété et produit quasiment seul son premier LP, l’excellent " Presents author unknown " (1997). Il était donc logique que l’ex-Jellyfish se produise simplement accompagné d’une vieille Fender noire (en référence au nom de la salle ?). S’il est très facile pour un groupe d’enfouir son absence totale de sens mélodique et de musicalité sous un tombereau de décibels – c’est pas Slipknot qui dira le contraire -, un mauvais songwriter qui se retrouve seul sur scène ne peut faire illusion bien longtemps. Falkner, pas vraiment adepte du bruit et de la fureur, en est assurément un bon, héritier des fines gâchettes new wave anglaises (XTC, Squeeze, Costello dont il reprendra un morceau) autant que des petits maîtres de la power-pop US (Shoes, Plimsouls).
Vêtu d’un T-shirt bleu " Iggy Pop tour 1977 " sous une élégante veste… noire, à l’évidence très content d’être là, le fidèle accompagnateur d’Eric Matthews interpréta avec une fougue tranquille une douzaine de morceaux, dont quelques perles de " Presents author unknown " : " I live ", " Miracle Medicine "… Quand bien même il s’en contenterait, ce type aussi talentueux qu’attachant mérite mieux qu’un succès d’estime.
Depuis leur troisième album, le très remarqué " When I was born for the 7th time " avec son tube "Brimful of asha" remixé par Fatboy Slim, Cornershop n’avait plus guère fait parler de lui. Il y eut bien Clinton, projet parallèle paraît-il plus disco, mais le commun des mortels n’en a pas entendu la moindre note. On croyait donc le groupe anglo-pakistanais définitivement passé à l’as, à l’instar de la plupart de ses contemporains brit-pop (Echobelly, Menswear, Sleeper… On a vraiment écouté ça ?). Erreur : les voici qui reviennent avec un nouvel album précédé par un mix de 24 heures (!!!) d’un des morceaux, diffusé live il y a quelques jours via leur site internet.
Amateurs d’aventures hors-normes, les musiciens de Cornershop se sentent sans doute un peu à l’étroit sur une scène " ordinaire ". Certes, le groupe est enthousiasmant quand il part dans de longs ragas (avec un seul " g ") à base de sitar et de percussions, et se révèle également convaincant dans un style plus classiquement rock ou pop groovy. Mais on aurait aimé être hypnotisé plutôt que simplement séduit. Pour cela, il aurait sans doute fallu que le chanteur Tjinder Singh y mette un peu plus de cœur, qu’il feigne au moins un semblant d’enthousiasme histoire de faire oublier ses limites vocales et la brièveté du concert (une heure rappel inclus). Dommage : il suffirait de peu pour que Cornershop, inventif et souvent surprenant sur disque, devienne enfin un groupe de scène vraiment excitant. Allez, camarades, un petit effort…
Vincent