Loading...
Disques

The Flaming Lips – 7 Skies H3

The Flaming Lips - 7 Skies H3

Pour ceux qui auraient zappé (et comment tout à fait les blâmer ?), The Flaming Lips a enregistré une chanson de… 24 heures en 2011. Oui, 24 heures. Comment cela ? Vous n’avez pas un des cinq crânes -humains- décorés d’une coulée de métal coloré sur le haut et équipés d’un port USB pour écouter le bidule, vendus 5 000 $ pièce pour Halloween en 2011 ? Vous avez en revanche, peut-être, écouté quelques minutes voire quelques heures, comme nous, de la dite chanson sur le site de streaming consacrée à l’œuvre ? Non ? C’est le problème de ce genre d’œuvres excitantes mais qui restent le plus souvent inaccessibles. Pour ma part, je rêve de pouvoir entendre, un jour, live, le quatuor n°2 de Morton Feldman, soit près de cinq heures sans interruption.

The Flaming Lips a pensé à nous, simples mortels, auditeurs lambda, en livrant une « distillation » de ces vingt-quatre heures, en cinquante minutes, sur deux faces de vinyle transparent, vendue exclusivement pour le Record Store Day 2014 (7500 exemplaires tout de même, faut pas pousser). Un texte fort intéressant accompagne l’objet : un rappel de toutes les tentatives de pousser la pop et la musique en général au-delà des trois minutes réglementaires (depuis « Like a rolling stone » de Bob Dylan jusqu’à « As slowly as possible » de John Cage commencé en 2001 et devant s’achever en 2640). On y apprend aussi comment les Flaming Lips ont procédé : enfermés dans un studio pendant une semaine avec le prod’ Dave Magic Fridmann, deux Lips dans chaque pièce et courrant de l’une à l’autre pour s’harmoniser. Et Drodz de rapporter que l’expérience « 7 Skies H3 » lui avait vidé son stock d’idées musicales. Reboot total donc.

Qu’est-ce qu’on trouve dans ce florilège ? Des bouts de chansons, comme « 7 Skies H3 (Can’t shut off my head) » et « Can’t Let it go » avec une voix de Wayne Coyne en bout de course mais très vivante pour le coup, et  aussi beaucoup de pièces instrumentales.

Citons « Meepy Morp » et ses irisations de claviers répétitifs, en mode Philip Glass version pimpante, ou encore « In a dream », d’origine germanique motorik mélancolique.

Mes moments préférés sont ceux où les percussions dominent, notamment « Battling Voices form beyond » : déluge de toms (voire de timbales ?) sur fonds de chants de sirènes mâles sous acide. Terrifiant, même si l’extrait est bien court et que la partie réelle est bien plus intéressante dans son extension maladive, jusqu’au bout des forces de frappeurs, avec ses baisses de rythme et de tension. Dans le même genre « Riot in my brain » nous ramène aux bons souvenirs de certains moments excitants, même si effrayants, de l’écoute de « Zaïreeka », la quadriphonie, voire l’octophonie, en moins : batterie et cris de déments, les aigus rehaussés dans le mix et, pour un peu, ce sont les chauve-souris violettes et les clébards affolés de « Zaïreeka » qui reviennent hanter nos lèvres, et nos oreilles, enflammées.

Avec « Can’t Let it go », là encore, on ne résiste guère à la magie des titres longs des Flaming Lips : facilité mélodique, chant mélancolique, mellotron, basse ronde, claviers et guitares acides, pulsation organique. Le quinté+++ dans le désordre.

On valide donc pleinement la version Digest, notamment parce qu’elle nous pousse à revenir aux origines (allez-y faire un tour) et aussi parce qu’elle met à jour le formidable laboratoire d’expérimentations de savants fous (vous savez, le genre à tester sur eux-mêmes le contenu des fioles), qui a permis la création de l’excellent album « The Terror » paru l’an passé, précis de psychédélisme ascétique, cauchemar multicolore et condensation d’esprit rock et d’expérimentation à son meilleur.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *