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Patrick Wolf – The Bachelor

PATRICK WOLF – The Bachelor
(Bloody Chamber Music / Naïve) [site] – acheter ce disque

PATRICK WOLF - The BachelorAh ! Patrick Wolf… De ses débuts en 2002 jusqu’à la sortie de "The Magic Position" en 2007, le jeune Anglais était certainement une des plus grandes têtes-à-claques du Royaume. Les raisons ne manquaient pas : airs de diva, déclarations à l’emporte-pièce sur sa haine des conventions alors que lui-même, franchement, ne créait absolument rien de nouveau, ambition musicale disproportionnée par rapport à un catalogue de qualité extrêmement variable, recettes faciles. Toutefois, avec son troisième LP, Patrick Wolf réalisait enfin une oeuvre de valeur, bien qu’inégale, et, surtout, commençait à se débarasser lentement de ses agaçants oripeaux de poète se voulant maudit. Incorporant des éléments de pop de chambre, de musique industrielle, d’électro, de rock indépendant, et proposant une palette émotionnelle et thématique à peu près équilibrée, "The Bachelor" représente logiquement le sommet de la carrière artistique du jeune homme. A la différence de "Wind in the Wires", nous ne sommes pas ici en face de boîteuses constructions électroniques dont la principale caractéristique était de se répéter inlassablement.

Epique et dramatique même selon les standards de Wolf, "The Bachelor" est son oeuvre la plus explosive. On y rencontre sans arrêt de grandes déclarations plus ou moins pertinentes. Prenons le titre d’ouverture et single "Hard Times". Associant de manière constante des guitares scratchées et un solide arrangement de cordes, le jeune homme s’engage à "travailler encore plus dur" pendant ces dures périodes. Bien qu’il soit dur de savoir s’il fait référence à la crise économique ou à des enjeux plus personnels, Wolf semble enfin mature et sincère… jusqu’à ce qu’arrive le maladif refrain pop-punk, où il sussure à on ne sait qui de lui montrer la révolution, comme s’il était une petite frappe de supermarché armé de son petit Che Guevara illustré. On ne peut s’empêcher de se sentir parfois quelque peu gêné pour lui. Toutefois, malgré quelques exceptions embarassantes, le disque contient des dizaines de moments absolument brillants. L’arrangement à la folk celtique de "Thickets" épouse à merveille les volontés romantiques de Wolf, de même que le chant de Tilda Swinton sur la chanson-titre. "Count of Casualty" rappelle les meilleurs titres de "Lycanthropy", même si l’on peut regretter que les beats électroniques soient trop étouffés dans le mix et aient mérité meilleur traitement. "Theseus" s’impose comme l’une des créations les plus accomplies et audacieuses de son catalogue, avec son succulent mélange de cordes (sitare Bishi, mandoline, violoncelle et violon) et sa dynamique orchestrale.

Dans "The Bachelor", il tente de se confronter avec honnêteté à ses origines. Il n’essaie plus d’être le ridicule voleur de feu rimbaldien des deux premiers albums, mais prend conscience, parfois douloureusement et à contre-coeur, d’être l’épicentre d’une dynastie, gravée dans le fer, dont il ne peut s’échapper quelles que soient ses volontés. L’album débute sans surprise par une grande déclaration d’indépendance, Wolf annonçant fièrement qu’il ne se mariera pas, laissant ainsi sa lignée s’éteindre, comme s’il désirait mettre fin à une imposture. Le jeune homme semble, en apparence seulement, le temps d’une chanson, la déchirante "Damaris", parler de tout autre chose, mais ne peut s’empêcher de glisser une référence à la lignée ("Thought I was more than my father’s son"). A partir de "Who Will", la structure se fragilise, le ton se fait plus doux, moins agressif, et une reconnection s’engage entre Wolf et son passé, fermant lentement la porte à des années d’errance et de rejet. Tout se passe comme s’il avait craché son poison et la seconde partie de l’album invoque ce besoin de renouveau, et la nécessité de fermer définitivement un chapitre ayant trop duré. Il termine l’album par ce résumé : "Remember always the open road". Le somptueux voyage de Patrick Wolf/Apps ne fait effectivement que débuter.

Julian Flacelière

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A lire également, sur Patrick Wolf :
la chronique de « Wind in the Wires » (2005)

Kriegspiel
Hard Times
Oblivion
The Bachelor
Damaris
Thickets
Count of Casualty
Who Will
Vulture
Blackdown
The Sun is Often Out
Theseus
Battle
The Messenger

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