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Mud Flow – Ryunosuke

MUD FLOW – Ryunosuke
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MUD FLOW - RyunosukeIl aura fallu près de dix-huit mois pour que le quatrième album des Belges de Mud Flow soit enfin distribué en France. Il faut croire qu’une affluence de talents, doublée d’une honorable notoriété, ne suffit pas toujours à dépasser aisément les frontières, fussent-elles contiguës. Enfin, mieux vaut tard que jamais, car il aurait été véritablement fâcheux de circonscrire un tel écrin mélodique au seul niveau national. Et ce n’est pas un hasard si je choisis le terme "écrin", car bien qu’il s’agisse d’un album plus relâché et plus décomplexé que les précédents, il n’en reste pas moins l’oeuvre (sans doute la plus aboutie) d’un groupe à l’identité bien trempée dont le créneau est, sans conteste, l’introversion, et dont le terrain de prédilection est davantage le studio que la scène (bien que ça reste à nuancer). C’est bien installés dans leur boîte à bijoux que les alchimistes sont les plus habiles pour transformer le son en or. Si le quartette (actuellement deux francophones et deux néerlandophones, comme quoi le métissage intercommunautaire donne des résultats éblouissants) est assez frileux quand il s’agit de devoir exalter, en une heure chrono, une foule de festivaliers avides de gros son pêchu, il n’y a pas meilleur hôte que lui lorsqu’il s’agit d’inviter implicitement l’auditeur dans son univers complexe et expérimental. Mud Flow, c’est, avant tout, un homme, Vincent Liben (chanteur-guitariste), le leader, seul rescapé de la bande depuis sa formation dans les années nonante. Et lorsque l’on prend le temps de parcourir la discographie du groupe, on se rend compte qu’il en est indubitablement l’âme, car si la coulée de lave, jaillie modestement en 2000 avec un album "Amateur" (contenant déjà quelques perles), n’a fait que s’intensifier (l’arrivée du claviériste Fred Donche apporte une plus-value non négligeable) au fil du temps et de ses pics d’activité, elle reste néanmoins constituée du même matériau magmatique qui rend la musique de Mud Flow singulièrement touchante. Vincent, dont la voix a gagné en profondeur, s’amuse à gravir des crêtes abruptes et à y jouer l’équilibriste sur une corde tendue, toujours à la limite de la cassure, et c’est beau, parce que quand on commence à craindre la chute, le funambule crée la surprise en empruntant une direction inattendue. C’est une des particularités du combo qui peut tout aussi bien séduire avec un efficace couplet/refrain ("Monkey Doll" quoiqu’on y retrouve quand même des choeurs et des guitares sympathiquement décalés ici et là), qu’avec des morceaux de huit minutes (le plus souvent), dont la magnifique chrysalide passe par de multiples phases : tantôt inondées de riffs ravageurs qui se font la guerre (mais jamais casse-tête), tantôt d’une limpidité déconcertante. Et le résultat de la confrontation de ces forces antagoniques (la tranquille vs l’immédiate) est d’une beauté transcendante. Saluons, pour la forme, le magnifique morceau éponyme qui résume fort bien les qualités de l’album, tout en nuances ; le sautillant "Trampoline", pour son finale multi-fanfaresques troublant ; les très intenses " The Story Was Best Left Untold" et "Shooting Star" qui, avec des morceaux comme "My Fair Lady Audrey" et "The Number One Play of the Year", me rappellent le dEUS, époque "The Ideal Crash". Bref, du prologue à l’épilogue, chaque petit bout d’histoire, riche en rebondissements et en intensité, trouve sa place de maîtresse manière. Finalement, quoi de plus normal pour un jet de basalte que d’atteindre des sommets. Il ne reste plus qu’à vous laisser submerger.

David Vertessen

A lire également, sur Mud Flow :
la chronique de « A Life on Standby » (2005)

My Fair Lady Audrey
The Number One Play of the Year
Planes
Ryunosuke
In Time
Trampoline
Monkey Doll
Waltz 1
The Story Was Best Left Untold
Shooting Star

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