Encore un bel objet physique et sonore, comme toujours chez Moone Records, label décidément voué à la satisfaction du fan. Au programme, deux groupes chouchoux des complétistes qui passent beaucoup trop de temps à pister les moindres sorties, toujours plus obscures les unes que les autres mais toujours, ou presque, dans des réalisations chiadées (ça se passe comme ça aussi, souvent, chez Gnome Life).
Little Wings qu’on avait un peu perdu de vue depuis « Black Grass », le dernier album chroniqué ici (deux albums tout même : « Last » et « Explains » mais on se rattrapera sur le prochain, promis), propose deux titres sur la face A. « Old Wind » donc : Will Oldham en mire, violon de saison et mélancolie pour tout horizon. Encore une fois, l’étirement du temps musical profite au minimalisme de composition. Sur « Arco Iris », plus ou moins variation d’ »Old Wind », Kyle Field poétise tranquille sur un fond de mélodica et sample des oiseaux, enregistre le temps, tout simplement.
On comprendra la parenté avec le geste zen de Maher Shalal Hash Baz, pour qui le sens du ici et maintenant est primordial. Ce qui, au passage, confirme et infirme, le complétisme du fan. Comme toujours se côtoient le nouveau et l’ancien, au moins pour deux titres, à ma connaissance : « Switch Back », entendu sur « Live at Harness » de cette année, ici plus rond (basse et toms basses) et aigre (sifflements et cymbales), le tout sur trituration de bandes finale et « Too Many Wives », confession et tube Kudien, s’il en est, avec un superbe solo de dobro de Mitsumune Tsuru, collaborateur de longue date de la famille Kudo.
On aime « Mousou Tokkyou », jazz rock en japonais avec le passage de violon, inattendu !, de Tori Kudo (encore une corde à son arc) et la trompette de Naoki Otani. Plus inattendu encore, tout est toujours possibilité chez Tori Kudo, le shoegaze ( !) Sorewo Yamereba. Avec une efficacité toute digne des faux frères Ramones. Et le tout en 1 minute 1 seconde, s’il vous plaît.
Ai-je précisé que cet album est pour fans hardcore seulement ? Les amateurs de beaux objets à tirage limité s’y retrouveront aussi. Pochette dessinée par Kyle Field lui-même, sérigraphiée bien sûr (ah ce brillant de l’encre qui retrouve presque le noir chinois du pinceau) et ceux qui auront été rapides recevront, en plus, car Field n’est jamais avare de cadeaux, un petit dessin original de l’artiste (pour notre part, un héron à corps de guitare avec nuage pluvieux au-dessus de la tête rappelant l’édition vinyle de « Made It Rain »).
Reste qu’on attend maintenant un format plus long de la part des deux duettistes (il suffit de l’écrire : « People 12 » de Little Wings sortira début 2019 : précommande ici).