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Leila – Blood, Looms and Blooms

LEILA – Blood, Looms And Blooms
(Warp / Discograph) [site] – acheter ce disque

LEILA - Blood, Looms And BloomsOù la trop discrète Leila Arab fait à nouveau parler d’elle. Après deux albums remarqués ("Like Weather" en 1998 et "The Courtesy of Choice" en 2000), dont la non moindre des qualités était une manière inquiète et sournoise de faire de l’electronica avec des lambeaux de soul ou de funk, dans une sorte d’économie (déjà) discrète et distordue, la suite de la carrière de la musicienne a quelque peu piétiné, notamment pour cause de mésentente avec les maisons de disques. Leila est sans doute trop attachée à son indépendance artistique et à la radicalité de ses choix esthétiques pour céder aux sirènes du bleep commun ou du crossover à raboter le dance floor. Elle en a payé le prix, mais elle peut sortir enfin un disque qui lui ressemble. Si sa formule musicale n’a pas foncièrement changé depuis lors, elle est tellement habitée et généreuse qu’elle prend le pas sur toute nostalgie. Certes, une forme de mélancolie poisseuse et la présence sensuelle de sa sœur Roya ou de Martina Topley-Bird rappellent quelque peu les heures fastes du trip-hop, mais très vite, en un patchwork dont les contours apparaissent vite assez flous, sa musique part dans toutes les directions, empruntant, à sa manière sinueuse, des voies détournées pour se rapprocher du cœur vital, débordant de bien des manières les intentions étroites de revival qu’on pourrait lui prêter. Entre langueur orientale ("Daisies, Cats and Spacemen", vraiment sublime, avec son faux air de boléro et la phrase vocale somnambule de Roya), plaisir ludique des collusions rythmiques ("Time to Blow" avec Terry Hall dans le rôle du fantôme vocal, "Little Acorns"), étranges plongées dans la torpeur soul (la plupart des morceaux chantés par le troublant Luca Santucci, complice de la première heure), instrumentaux de toute beauté jouant sur des effets de déflagration discontinue (le doublet imparable "Mollie" / "Mettle"), la diversité est ici signe extérieur de richesse. Pourtant, il y a des constantes immédiatement repérables qui font la patte de la musicienne : l’attention maniaque au moindre détail de production (qui transforme l’écoute en un effeuillage sensuel et sans fin), une façon de faire disparaître le format couplet-refrain au profit d’une circulation où le chant progresse au milieu d’atmosphères tantôt luxuriantes, tantôt raréfiées, laissant apparaître incessamment de nouveaux effets ; chaque morceau est ainsi construit comme une aventure sans balise (sinon la constante des rythmes) qui ne doit surtout pas ramener au point de départ. Musique autarcique peut-être, démodée ou hors-saison sans doute, mais farouchement obsédante et belle.

David Larre

A lire également, sur Leila :
la chronique de « Like Weather » (1998)
Mollie
Time to Blow
Little Acorns
Daisies, Cats and Spacemen
Mettle
Teases Me
Carplos
The Exotics

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