LANGHORNE SLIM – Be Set Free
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Langhorne Slim, de son vrai nom Sean Scolnick, vient de Pennsylvanie mais a éclaté au grand jour du côté de Brooklyn. Titulaire d’un diplôme du conservatoire de musique d’une université new-yorkaise, il a eu quelques moments de gloire (en 2005, le NME a classé son LP "Start Your Own Country" parmi les meilleurs de l’année, sûrement avec 1000 autres disques) avant de retomber dans un anonymat presque parfait, en tout cas de ce côté-ci de l’Atlantique. Chez nos (presque) voisins américains, il a partagé la scène avec Jeffrey Lewis, Cake ou The Avett Brothers, ce qui lui a valu d’être classé comme antifolk à l’époque.
Mais à l’écoute de ce disque, soit notre beautiful loser a changé complètement d’orientation, soit il y avait erreur dès le départ. Toujours est-il qu’il a choisi cette fois-ci de ratisser large, entre country, folk et parfois même franchement pop pour le coup sur des passages trés arrangés. Cette volonté de brasser plusieurs genres a finalement l’effet pervers de donner un disque parfois un peu décousu, avec ses fulgurances mais aussi ses passages irritants, tant le songwriter a eu la main lourde certaines fois. Le larmoyant "I Love You, But Goodbye" pourrait passer pour un titre de l’affreux James Blunt, mais le morceau est un cas extrême : on en reste plus souvent au stade de la maladresse ou de l’influence pesante. Le sympathique "Land of Dreams" affiche un peu trop son étendard "Apprenti Bob Dylan" pour convaincre totalement, la country de "So Glad That I’m Coming Home" montre une envie chez Langhorne Slim d’avoir son E Street Band acoustique rien qu’à lui, et "Boots Boy" est un peu à l’étroit avec cet orgue envahissant.
Ceci dit, les titres restent tout à fait écoutables, et ne doivent pas faire oublier les très bons moments que l’album renferme. Il s’ouvre ainsi sur les énergiques "Back to the Wild" et "Say Yes", aux arrangements ambitieux mais justes et aux textes plutôt bien ficelés, comme l’est "Yer Wrong" d’ailleurs. "Cinderella" est une tentative de big band très digeste, "Sunday by the Sea" et "Be Set Free" remplissent leur mission "faire chialer un bon coup dans sa bière", quand "For a Little While" remporte sans doute le titre de ballade qui tue. Assez épurée dans sa forme, la chanson est aussi le titre où toutes les aspirations du New Yorkais d’adoption convergent le mieux : orchestration ambitieuse, émotion et dynamisme se téléscopent fort élégamment. La voix du chanteur, éraillée juste ce qu’il faut, est la dernière touche qui finit de rendre le titre convaincant, à défaut de le faire pour l’ensemble du disque. Avec un certain sens de l’équilibre, Langhorne Slim marche au bord du précipice, mais fort heureusement se rattrappe bien souvent et ne tombe en tout cas jamais tout à fait. Rassurant, mais on est en droit d’attendre un peu moins de frayeurs la prochaine fois.
Mickaël Choisi
A lire également, sur Langhorne Slim :
la chronique de « s/t » (2008)
Back to the Wild
Say Yes
I Love You, But Goodbye
Land of Dreams
Cinderella
Be Set Free
For a Little While
Sunday by the Sea
Leaving My Love
Yer Wrong
Blown Your Mind
So Glad That I’m Coming Home
Boots Boy