Ceux qui connaissent déjà les trois premiers albums de Jessica93 se retrouveront en terrain conquis d’avance à l’écoute de ce mélange de destruction et de mélodies paradoxalement pop qui s’abat sur nous dès les premières notes de « Guilty Species ». Les compositions abrasives de « RIP In Peace » nous rappellent combien un concert donné l’année dernière au Café de la Danse – où Geoffroy Laporte est passé du one-man-band qui sample guitare, basse et boite à rythmes à un trio sur scène, et que l’on se rassure la boite à rythmes est toujours là – nous confirmait déjà l’intention de pousser cette musique jusque dans ses derniers retranchements. Sorti de Bondy on ne sait trop comment, Jessica93 relie Sussex et Aberdeen, Gothique et Grunge pour un déferlement de bruit une fois de plus indispensable.
« Guilty Species » dépasse bien évidemment ses références, il s’en nourrit, ne s’en cache pas et y garde cette absence de concession. C’est sa limite et sa grande force : la plupart des titres démarrent sur une ligne de basse d’une rare puissance, épaulée par des guitares distordues déterminées à pilonner sans vergogne nos tympans, les textes de Geoffroy Laporte incarnent toujours autant cette absence d’avenir que l’on ressent de jour en jour et la programmation de la boite à rythme vous serre la gorge avec autant de force que sur les premières compositions de Steve Albini. On finit d’écouter ce disque sur les rotules, mais avec la certitude d’avoir trouvé là comme un rare témoignage guerrier de cette époque violente.
On ressent presque une note d’espoir sur l’abrasif « Uncertain To Me », qui vient conclure ces huit titres. Après avoir ressenti un tel chaos, on remonte la pente pour repartir avec l’intime conviction que « Guilty Species » est l’un des plus beaux disques à écouter sous sa capuche quand la pluie s’abat sur nous au milieu de la ville.