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Disques

Fennesz – Bécs

Fennesz - Bécs

Hasard de calendrier, manque de concerts électroniques ?  La venue de Christian Fennesz à Stockholm a réussi à nous rendre dingues alors qu’après l’avoir adoré, après l’avoir suivi sur chacun de ses concerts français ou presque, Le Fennesz avait réussi à nous lasser. On se rappelle ceux suivant la sortie de « Venice » où le guitariste le moins guitariste de l’histoire (avec Keith Rowe peut-être) semblait en roue libre, amassant les cachets par pelletées de laptop et reproduisant peu ou prou le même concert d’un jour sur l’autre. Il faut dire qu’il s’imposait en homme incontournable de la scene arty- expérimentalo-institutionnelle se produisant au Festival La Route du Rock comme au prestigieux Groupe de Recherches Musicales avec le maître des lieux Christian Zanesi et Vainio de Pan Sonic, sans parler des Instants Chavirés mais là, il semble que c’était, pour le moins, la cantine du maître. Bref… on l’a adoré ce Fennesz. Capable de retraiter une guitare dans le hachoir du laptop pour en produire une fumée grise (« Hotel Paral.lel »), reprendre et désorganiser des titres de The Rolling Stones et The Beach Boys (« Fennesz plays »), cracher sur la posture scénique du rock n’roll et de son instrument fétiche, la  guitare, et être le plus punk des punks en montant sur scène planqué derrière un écran bleuté (avec ses potes de Fenn o’ Berg, Jim O’ Rourke et Peter Rehberg), et enfin revenir par des chemins détournés vers une pop ensoleillée avec des guitares irisées via le macbook (« Endless Summer »). On a follement aimé le suivre dans ses productions aux Instants avec ses collègues déconstructivistes de The 4 Gentlemen of the guitar (avec les aminches Ambarchi, Rowe, Nakamura), ou en résidence au GRM et explosant une composition magistrale dans l’acousmonium de Radio France (de loin, l’expérience sonore en concert la plus marquante de ma vie). Alors oui, quand on l’a vu atteindre le succès et cachetonner  sans vergogne, nous avons été déçus. Depuis « Venice » et la tripotée de mauvais concerts qui ont suivi, nous avons largué l’Autrichien. Il a dû s’en rendre compte car le concert de Fylkingen en septembre dernier montrait un Fennesz en grande forme, prêt à nouveau à en découdre. On ne rattrape pas complètement  le passé mais on s’est plongé avec une certaine joie dans ce « Bécs » pas si mauvais que ça, sorti sur le label historique de Fennesz, Mego.

Au premier abord (« Static Kings »), on constate que la formule (toujours gagnante ?) n’a pas changé depuis « Endless Summer » : cette  sunshine pop maltraitée par le laptop qui donne des couleurs et un bon teint hâlé à la guitare de Fennesz. On retrouve cette musique chatoyante, faite de reflets, autrefois inouïs, ici un peu convenus mais toujours rafraîchissante. Une des bonnes idées est de s’associer la batterie de Martin Brandlmayr, le maître es percussion de Radian notamment. La batterie  (trafiquée évidemment) prend alors des allures de splashes aquatiques, d’écume mousseuse qui se marie divinement avec la guitare fenneszienne.

Sur « Liminality », c’est Tony Buck qui s’y colle dans un registre un peu moins électro, plus improvisé mais jouant sur des motifs de roulements pierreux assez bienvenus.

Fennesz retrouve ses premières amours post industrielles sur « The Liar », avec des sonorités très dark, des tons charbonneux, gras, des grondements sourds et des crépitements. Voilà un Fennesz peu entendu depuis longtemps. Tout comme sur « Pallas Athene » en ouverture de Face B ou il joue sur des sonorités d’orgues rappelant certaines marottes du label expérimental Touch.

A part ces quelques titres un peu à part, Fennesz fait du Fennesz, celui millésimé « Endless Summer »/ »Venice », celui de la consécration, l’expérimental qui ne fait pas (trop) peur aux popeux, dissimulant sa guitare dans des voiles de gazes, de gaz, des liquides colorés quelquefois brumeux, souvent limpides et lisses. C’est toujours beau au niveau textures, peut-être un peu lassant à la longue au niveau  structure (« Bécs »).

Et puis, on attend toujours au tournant Fennesz coincé dans son rôle d’icône, garant d’un son et fatalement prisonnier de ce même son. On attend disait-on la sortie du Fennesz qui ne sera plus Fennesz. Peut-être l’avant-dernier titre « Sav », en colaboration avec Cédric Stevens indique la voie avec ses field recordings crépitants, ses guitares-orgues à la Vangelis, ces tintinabulations.

On se souvient du retour de la guitare-instrument, sur scène, dans les concerts de Fennesz : c’était un événement !  Elle fait ici son retour, délicate sur « Paroles », au grand jour, à peine taquinée par des glitches et distorsions d’autres guitares plus Fennesziennes. On est loin de Six Organs Of Admittance mais pas tant que ça ni de Matt Mondanile voire de Little Wings. Fennesz le surfeur du froid.

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