CINNAMON – Vertigo
(Snap)
Des fois, c’est à se demander pourquoi? Pourquoi les Cardigans ou, pire, les Cranberries ont autant de succès populaire? Et pourquoi un tel succès populaire boude des groupes possédant un don mélodique immense tels Ivy, Saint-Etienne ou Cinnamon? Au risque de paraphraser le philosophe gallinacé Caliméro, disons que c’est vraiment trop injuste. Vraiment.
Pour la petite histoire, Cinnamon est bicéphale : Frida Diesen pour la Suède et la voix et Jiri Novak pour la République Tchèque et les guitares (et une cravate rayée assez moche aussi). La Hollande est peut-être l’autre pays du fromage, la Suède est décidément l’autre pays de la pop. De celle qui s’écoute en sirotant un verre de grand Bordeaux. Non madame, on n’écoute pas Cinnamon en buvant un vulgaire Cinzano bon pour de l’easy-listening de cinquième division. Les mélodies ont beau être directes et sucrées, elles se bonifient réellement avec le temps. Ces « I Used To Be Your Loneliness » ou « World Of Crime » s’incrustent illico dans votre cerveau et pourtant il est impossible de s’en lasser au bout de 43,5 réécoutes (testé pour vous).
Justement, Cinnamon passe maître dans l’art du dosage. Malgré l’immédiateté des mélodies, les arrangements concoctés par Louis Philippe sont suffisamment subtils pour que l’on revienne explorer ces chansons si légères en apparence : quelques touches de piano ou de xylophone (pour adoucir les guitares) par ici, quelques violons chinoisants et quelques cuivres tonitruants (pour appuyer les ritournelles) par là. Une décoration riche mais subtilement disposée pour donner toute leur force à ces douze titres. Par exemple, les idées de mélodie et de structure du lunaire « Maybe In The Next Life » sont tellement nombreuses que d’autres en auraient fait cinq chansons. Mais, plutôt que de laisser exploser ces idées dans tous les sens comme chez… disons… Olivia Tremor Control, chez Cinnamon tout est agencé avec harmonie. Cinnamon sait en outre jouer avec la voix ambiguë de Frida Diesen : si celle-ci semble tout d’abord douce et câline pour l’oreille, c’est pour mieux empoigner l’auditeur, le secouer sans répit jusqu’à cet « Angel Eyes » final et obsédant.
Et si vous doutez encore de la classe de Cinnamon, sachez que Bertrand Burgalat a mis son plus beau costume beige pour co-produire tous les morceaux de « Vertigo ». Convaincu? Maintenant, espérons que Cinnamon ne seront pas les nouveaux Madder Rose : espérons qu’ils ne tomberont pas
dans l’oubli après deux albums synonymes de grands espoirs pour la pop contemporaine.
mr modular
I Used To Be Your Loneliness
Nothing
Did You Think I Would Ever Let You Go ?
Take Your Time
Stars Collide
World Of Crime
A Few Grains Of Sand For Working Your Whole Life
Averon
Maybe In The Next Life
March Of The Cinnamons
More Than You Bargained For
Angel Eyes