Comme beaucoup, depuis l’annonce de la mort d’Andrew Fletcher, j’ai ressenti le besoin de plonger à nouveau dans la discographie de Depeche Mode, l’un des groupes que j’ai le plus écouté durant mon adolescence. Eprouver un peu de ces gouffres sentimentaux, parfois éclatants de lumière, qui emplissent les sillons de “Violator” ou de “Black Celebration”. Une écoute forcément émue de quelques-uns des morceaux essentiels de la formation anglaise, de “Just Can’t Get Enough” à l’inoubliable “Enjoy the Silence”, pour se rappeler que Depeche Mode fut, pendant une bonne décennie, l’une des plus belles machines à tubes de la planète pop, de ses débuts timides sous sa première incarnation (et Vince Clarke comme songwriter) au triomphe planétaire de la seconde moitié des années 80 et de la première des années 90. Un phénomène immortalisé par “101”, beau film signé par le légendaire D.A. Pennebaker, qui documenta de manière sensible l’intense tournée américaine de “Music for the Masses”, lors du printemps 1988. Et l’amour porté au groupe par des millions d’adolescents.
Comme peu, les hommes de Basildon ont su, sous des vernis électroniques accrocheurs, injecter à leur musique une dose de mélancolie, une sentimentalité qui n’appartenait qu’à eux et les rendaient tout à fait indispensables. La musique de Depeche Mode, comme l’une de nos plus fidèles alliées. De celles qui aident à traverser nos jours et nos nuits. Rêver d’ailleurs, et d’un âge adulte qui se refuse encore.
Troisième homme préférant l’ombre à la lumière, Andrew Fletcher aura permis à Dave Gahan et Martin Gore d’éviter de déposer les armes, en particulier au milieu des années 90 lorsque le chanteur frôla la mort à plusieurs reprises. Moments de crise dont le groupe a toujours su se relever, jusqu’à ce funeste jour de mai 2022.
Fondateur de la toute première incarnation du groupe avec Vince Clarke dès 1980, avant même l’arrivée de Martin Gore puis Dave Gahan, “Fletch” aura ainsi été l’artisan discret mais essentiel de la longévité de Depeche Mode. Avec son look d’éternel étudiant en architecture et son sens du marketing, ce passionné de musique laissera quelques images indélébiles chez nombre de ses fans. Des posters saturés de couleurs, où Fletch, cheveux auburn et visage pâle sur chemise sombre, prenait la pose avec les trois autres, jusqu’aux dernières apparitions live du groupe, placé à l’arrière-plan, derrière ses synthétiseurs et un Dave Gahan déchaîné. Si l’on ignore tout du devenir du groupe anglais, il est en tout cas certain qu’avec sa disparition, rien ne sera plus jamais pareil. Avec Andrew Fletcher, c’est aussi un peu plus de notre jeunesse qui disparaît. Enjoy the Silence.
Bilan 2022 – Les disparus – POPnews
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