AND ALSO THE TREES
When The Rains Come. En ce jour de juin, la pluie est venue, et And Also The Trees aussi, au rendez-vous de deux concerts parisiens dans l’intimité du Lavoir Moderne, pour présenter son nouvel album composé uniquement de versions acoustiques de morceaux de son répertoire. On retrouve le groupe au lendemain du premier concert, non loin de Beaubourg, à l’heure du déjeuner. On commence donc par manger, après le toujours délicat exercice de la traduction de la carte du restaurant en anglais, puis je mets en marche mon mini-disc.
Qu’est-ce qui a déclenché cette envie d’enregistrer cet album constitué de versions acoustiques de chansons anciennes – plus ou moins anciennes ?
Simon : Effectivement, certaines d’entre elles sont vraiment anciennes. Pour moi, ce qui a créé l’étincelle, c’est d’entendre Ian pendant les répétitions ou les balances, à la double basse. Parfois, par hasard, il lui arrivait de jouer des bouts d’anciennes chansons avec, plutôt que les chansons de « (Listen for) the Rag and Bone Man » qui ont été écrites avec cet instrument. J’ai soudain vu des portes s’ouvrir, une façon nouvelle d’explorer ces morceaux. Ça a été le premier signe pour moi.
Quand nous étions en tournée, voyageant vers Berlin par exemple. Tu laisses tes pensées dériver, quand tu voyages. Je me suis demandé ce que pourrait donner un album d’And Also The Trees avec uniquement une voix très en avant, qui raconterait une histoire, presque de la poésie.
Et bien sûr ce qui a achevé de nous convaincre, c’est quand Damien nous a contactés pour un concert secret en acoustique au 7ème Ciel, l’an dernier. Notre première réaction a été de refuser, tout simplement parce que nous n’avions rien à jouer en acoustique. Et puis nous n’avions pas le temps de préparer un tel concert, nous étions très occupés à préparer la tournée à venir. Et puis Damien nous a envoyé des photos de la vue de sa terrasse, avec le Sacré Coeur et Montmartre la nuit, et là nous nous sommes dit que cela serait quand même une sacrée opportunité (rires). Et comme tu dois le savoir, il est très convaincant (rires). Nous avons réussi à répéter deux ou trois fois, à trois. Nous voyions ça comme une expérimentation. Et le concert a vraiment bien fonctionné. Nous avons énormément apprécié ce moment. Ce fut un sentiment très rare que de se retrouver sur cette terrasse, une expérience étrange et très libératrice de jouer sans électricité avec le public assis autour de nous.
Une fois cette première marche franchie, nous avons eu le sentiment que nous étions à mi-parcours sur le chemin qui nous mènerait à réaliser un album acoustique. Ensuite, nous avons sélectionné les chansons qui fonctionnaient bien, et nous avons peaufiné les arrangements, pour adapter les morceaux à cette formule instrumentale.
Justin : nous avons également essayé d’expérimenter avec les choeurs, ce que nous avions fait sur une chanson pendant le concert au 7ème Ciel.
Simon : nous n’avions jamais utilisé de choeurs auparavant. Cela a ajouté quelque chose de très « pop » aux morceaux.
Vous ressentiez une certaine appréhension avant ce concert ?
Simon : j’étais très nerveux… Je ne sais pas pour les autres.
Justin : moi ça allait.
Ian : sans instrument électrique, les détails ressortent davantage, la musique est plus vulnérable. C’est plus difficile.
Simon : on ne peut pas se cacher.
(et là, c’est le drame, les piles, pourtant rechargeables, de mon enregistreur sont mortes, il s’arrête net, heureusement Justin le remarque…)
Emer : Ah, c’est pas vrai, ça recommence !
Simon : Décidément… La Blogothèque a voulu nous filmer, et après les deux premières chansons, ils sont tombés en panne de batterie, et il n’avait pas de batterie de rechange… Et pour le deuxième concert de la tournée, la guitare de Justin a subitement arrêté de fonctionner, en plein milieu d’un morceau. Il a dû sortir de scène, c’était très embarrassant, et il s’est avéré que c’était la pile qui était morte.
(finalement, ça repart…)
Il faut toujours vérifier ses piles avant de partir en tournée… et avant de faire une interview également. Pour en revenir à « When the Rains Come », comment avez-vous choisi les morceaux qui y figurent ? Est-ce que vous en avez essayé certains qui finalement n’ont pas fonctionné dans cette formule ?
Justin : Simon et moi avons passé tout notre répertoire en revue, ce qui fait plus d’une centaine de chansons. Nous avons fait une short-list de chansons qui pourraient fonctionner. C’était aussi l’occasion de corriger certaines choses qui ne nous convenaient pas dans les versions originales. Par exemple, « Jacob Fleet » est une chanson populaire, mais il y a quelque chose qui cloche dans la version originale. Beaucoup de chansons avaient déjà quelque chose d’intrinsèquement acoustique en elles.
Simon : En ce qui me concerne, j’envisage plus les choses visuellement, à travers les paroles notamment, et pas comme un musicien. En particulier, quand les chansons impliquaient des personnages, cela paraissait plus naturel.
(de nouveau, le mini-disc s’arrête… Dommage, ça avait l’air intéressant ce que disait Simon. On trouve une prise de courant et on se déplace, au grand dam des serveurs)
Ce n’était pas tout tracé, il y a eu des surprises tout de même…
Justin : Oui, nous avons d’heureuses surprises, des accidents bienvenus, avec le son du dulcimer.
Emer : Comme « Lucy », par exemple.
Justin : Oui, c’était chouette.
Simon : Quand vous avez une chanson qui a une certaine puissance, l’instinct pousse à la reproduire avec la même puissance. Cela peut-être plutôt désarmant de se rendre compte que si vous prenez le chemin inverse, si vous déshabillez la chanson de toute cette énergie, comme on l’a fait pour « A Room Lives in Lucy », elle prend paradoxalement une toute autre puissance. Ça c’était une réelle surprise, jamais je n’aurais imaginé cela.
Cela sonne comme une chanson totalement nouvelle.
Simon : oui, tout à fait.