Site plein de cachet, jauge raisonnable (environ 55 000 personnes sur trois jours, des chiffres proches de ceux de 2012), temps magnifique (contrairement à l’année précédente), et surtout concerts pour la plupart de haute volée : la cinquième édition de Beauregard, près de Caen, a été une belle réussite. Compte rendu détaillé sous forme de monologue, POPnews n’ayant dépêché qu’un seul envoyé spécial (textes et photos) cette année.
Vendredi 5 juillet
Alors qu’on traverse à pied le parking VIP (vraiment VIP, puisqu’on y croise pas moins de deux Porsche Cayenne) résonne la dernière chanson des Vaccines. Faute de pouvoir arriver assez tôt, on les aura donc manqués, comme Goodbye Horses, Half Moon Run et Bow Low qui les précédaient. Mais la soirée promet encore quelques réjouissances. Comme les Californiens de Local Natives sur la scène B, la plus petite des deux scènes. Leur concert d’une petite heure est agréable à défaut d’être absolument marquant, les morceaux du premier album s’avérant plus efficaces que ceux du second (mais peut-être parce qu’on les connaît mieux). Le groupe semble en tout cas ravi de revenir trois ans après son premier passage ; rendez-vous en 2016 ?
On fonce ensuite à la scène A (qui est heureusement toute proche) pour voir la première belle prise de cette édition 2013 : New Order, qui arrive sur scène au son d’un classique d’Ennio Morricone. Sans Peter Hook, mais avec Gillian Gilbert qui est revenue en 2011 dans le groupe, plus le guitariste Phil Cunningham et le bassiste Tom Chapman, plus jeunes, qui font le job. Le son n’est pas parfait, mais quand même nettement meilleur qu’à la Fête de l’Huma l’an dernier.
Avec onze morceaux seulement, la setlist n’offre pas trop de surprises en dehors de quelques intros retravaillées, mais on est content d’entendre des classiques comme “Ceremony”, “Regret”, “Blue Monday”, “Temptation”, “Your Silent Face” ou “The Perfect Kiss” – l’un des meilleurs moments du concert, avec ses riffs de guitare funky. Ray-Ban sur le nez, Barney adresse quelques phrases au public (« Nous vous avons apporté le soleil d’Angleterre ») et lui offre sur “Bizarre Love Triangle” ses habituels pas de danse un peu ridicules, qui éviteront toujours à New Order de ne devenir qu’une grosse machine pour mégafestivals.
Le concert s’achève par une forêt de bras en l’air sur “Love Will Tear Us Apart”, pendant lequel on voit un festivalier déguisé en squelette se faire porter par la foule alors que le visage de Ian Curtis s’affiche sur l’écran en fond de scène – étrange impression.
Sur l’autre scène, c’est Alt-J qui suit. La musique savante et déconstruite des Anglais, avec ses décrochages mélodiques, ses breaks impromptus et ses passages a capella, ne semblait pas vraiment calibrée pour un succès de masse qui a pourtant fini par arriver. Du coup, le groupe balade depuis au moins un an sur les scènes du monde entier des chansons pas forcément faites pour ça. Alt-J n’est donc pas un groupe extrêmement passionnant en live, ce qui n’empêche pas leurs jeunes fans du premier rang, des triangles dessinés sur les joues, de vivre le concert à fond. Pour notre part, on suit quand même ça sans ennui, d’autant que Gus, le très sympathique clavier de cette formation cultivée, fait l’effort de parler français. Il se demande ainsi qui est le fameux John, personnage fictif et donc invisible utilisé pour la com du festival (et censé être le maître du domaine de Beauregard, si l’on a bien saisi).
Le concert de -M- nous laisse le temps de dîner, et même de reprendre du dessert puisque Chedid fils s’est fait allouer la plus longue plage horaire de cette édition 2013 (85 minutes). Mais même à l’autre bout du site, difficile d’échapper à ses solos de guitare à rallonge et à ses délires régressifs. Enfin, au moins on ne le voit pas.
The Jon Spencer Blues Explosion s’avérera un excellent moyen de se décrasser les oreilles avec du rock’n’roll 100 % cuir. Certes, quels que soient les morceaux qu’ils jouent, on a toujours l’impression avec eux d’assister peu ou prou au même concert, mais la formule semble inusable. Bref, il n’y a ici qu’un seul Jo(h)n, et il s’appelle Spencer, comme il l’affirme lui-même.