MELMAC – Les secours arrivent et prennent le relais
(Ronda)
Après la sortie confidentielle, il y a quelques mois seulement, d’une captation live de leur travail d’improvisation, ‘Game_02’, les frères Reverter proposent sur leur label Ronda un nouvel album qui confirme tout le bien que l’on pense de leur musique : singulier croisement d’influences électroniques, expérimentales et post-rock, leur recherche tient à la fois de l’alchimie sonore d’éléments disparates, toujours subtilement dosés, et d’une maîtrise formelle qui associe le talent mélodique et le penchant sériel. Si les ingrédients de la recette sont maintenant bien connus, le savoir-faire des maîtres d’œuvre a atteint ici un degré de maturité supérieur : la fusion des éléments se fait avec une élégance et une discrétion rares, des percussions spectrales (cloches, xylophones, gamelan et autres, tous apparemment samplés) accompagnent la traversée sonore et lui donnent ce rythme particulier, instable, hagard, qui rend le disque entêtant, les guitares et les boucles électroniques rivalisent en délicatesse ou en intensité, tour à tour stridentes ou graciles, les inserts de sons concrets ajoutent encore une touche dissonante à un ensemble par ailleurs particulièrement cohérent, sorte de bande-son idéale d’un film fantastique muet et expressionniste (Murnau ? Sjöström ? Lang ? Autant d’évocations possibles). Le groupe ne semble se soucier que de cultiver un mystère qui, au fur et à mesure que les morceaux s’égrènent, s’épaissit et vous hante. Après l’apparition du folk enchanté de Cyann & Ben il y a quelques mois, c’est une nouvelle et passionnante illustration de l’influence du fantastique sur les musiques dites populaires, sauf que le fantastique est ici sacrément savant et savoureux. À déguster jusqu’à l’angoisse.
David