THE HANDSOME FAMILY – Singing Bones
(Loose / PIAS)
À l’écoute du dernier album d’Handsome Family on est d’emblée captivé. Comment le groupe parvient-il à proposer une musique aussi neuve en respectant, à la lettre, les canons de la country ? Le résultat aurait pu être conventionnel, mais, comme les grands cinéastes lorsqu’ils s’attaquent aux films de genre, Handsome Family parvient à dépasser les clichés pour produire une œuvre personnelle. Tentative d’épuisement d’un style musical ? Handsome family, groupe de "country conceptuelle" ?
Ici, de la country, il ne reste que le squelette. Dépouillée d’ornements superflus, la musique est régénérée. En se concentrant sur l’essentiel, le groupe fait preuve d’une sobriété qui donne profondeur et majesté à l’album.
On s’y installe confortablement et on le laisse se dérouler.
L’écriture s’inscrit toujours dans un même schéma: tempo lent, rythme de valse, dépouillement et finesse des arrangements. Cette sobriété a peut-être été favorisée par un enregistrement à la maison. Brett et Rennie Spark jouent eux-mêmes de tous les instruments (Brett a même appris à jouer de la scie musicale et de la pedal steel pour l’occasion).
La composition des morceaux, très cadrée, très cohérente, permet pourtant quelques escapades. B. Spark peut ainsi entonner un "The world should end in Ice" a capella à faire trembler les murs du temple.
Cette chanson est emblématique du grand point fort du groupe : la voix de Brett Spark, profonde comme un canyon, chaude comme la vallée de la mort. La filiation avec Johnny Cash est évidente.
C’est d’ailleurs la filiation avec l’Amérique qui est évidente : on a ici affaire à un groupe qui questionne la musique populaire américaine. De fait, la famille élégante traite sa musique avec une certaine distance, une sorte de détachement : on baigne dans un fantasme de country, la country d’une Amérique idéalisée. C’est sans doute ce qui confère à cet album sa beauté un peu froide : il est le fruit d’une pensée.
Dès lors, Handsome Family dépasse les frontières de l’alt. country pour finalement nous offrir un grand disque universel. Voici donc un groupe qu’il ne faut pas enfermer dans un carcan car il devrait toucher d’autres auditeurs que les puristes du genre.
Vincent Subverville
Forgotten Lake
Gail With the Golden Hair
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Bottomless Hole
Far from Any Road
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Song of a Hundred Toads
If the World Should End in Ice