THE DOUBLE – Loose In The Air
(Matador / Beggars) – acheter ce disque
La première fois que j’ai écouté "Loose in the Air", coincé auprès du feu, à la campagne, par un après-midi brumeux de février, je n’ai pas pu m’empêcher de penser : "P’tain, c’quoi, c’truc arty bizarre, ah non vraiment, là, y a d’la lose dans l’air", ou quelque chose d’approchant. Il faut dire qu’entre le dernier Macca et les roucoulades de Lanegan et Campbell, je me la jouais un peu boisé rustique, chemise à carreaux, ça sent bon le sous-bois. Et ça, y a pas à dire, au bout d’un moment (huit jours, mettons), ça commence à craindre. Donc, je m’y suis mis à nouveau, dans mon studio parisien, avec pluie dehors, klaxons qui pétaradent, et l’humeur pas cool, et ça marche beaucoup mieux. Arty donc, parce que new-yorkais, le groupe The Double, qui sort ici son premier album chez Matador, mélange des atmosphères oppressantes, faites de nappes de claviers étranges (tendance orgue électronique) et de guitares stridentes, à un sens biaisé de la rythmique (tendance morceaux presque dansants : "Idiocy" ou "Hot Air") pendant qu’une voix, plutôt métallique et haut perchée, mène le bal. Autant dire que ce disque, produit par Steve Revitte, déjà aux manettes pour les Black Dice (pas non plus des chanteurs de variét’), est un peu étrange. Mais entre les gouttes acides, y a parfois une brise légère qui se faufile, une jolie mélodie, un refrain entêtant. Et même des morceaux accrocheurs : "Idiocy" encore ou "In the Fog". On apprécie aussi de sentir le groupe dans une créativité fébrile, toujours prêt à virer de cap, entre des instrumentations psyché-prog et une sorte de blues électrique non identifié. Parfois, de façon discrète, les références avouées de la formation se rappellent au souvenir de l’auditeur (les claviers Cosmos 1999 de "Busty Beasty" renvoient à Alice Coltrane, les déferlements de rage à Suicide) et il y a encore des références tues qui semblent évidentes (les Doors dans le choix et le jeu des claviers), mais on ne peut pas dire que ce soit là plus que des pistes suggestives. Le groupe a plutôt l’inspiration personnelle, le geste inédit et la finition chaotique.
David Larre
Up All Night
Idiocy
Icy
On our Way
Ripe Fruit
Hot Air
What Sound it Makes the Thunder
In the Fog
Dance
Busty Beasty