VALÉRIE LEULLIOT – Caldeira
(Village Vert / Wagram ) [site] – acheter ce disque
C’était en 2003. Il devait être une heure du matin. Quelque chose comme cela. Affalé sur le canapé, je regardais d’un œil torve les chaînes musicales défiler sur mon écran de télévision, à la recherche de quelques nouveautés intéressantes perdues dans la masse informe et formatée. Soudain, une guitare, une voix, une mélodie m’attira. "Je reviens, je reviens, encore / tu n’as même pas vu que j’étais parti alors". Pendant les six minutes que dure ce morceau, les cordes flottent sur la mélodie, tellement dans l’époque… Cette chanson a l’odeur des années 00, cette impression de fuite en avant, de regret permanent. Un peu à l’image de "Missing" par Everything But The Girl, qui symbolisait tant ces années 90 bleues et grises. Comme une pochette de Portishead, en fait. La chanson de cette nuit-là s’appelait "Je reviens" et le groupe était Autour de Lucie. Un groupe passionnant, auteur de quatre albums en dix ans et menée par la douce Valérie Leulliot.
Valérie, en quête d’autres horizons sonores, collabora avec Giant Sand, Calexico ou participa à ce magnifique hommage à Lee Hazlewood. Autour de Lucie s’envola dans les airs, et Valérie partit sur les chemins de l’album solo, qu’elle nous livre aujourd’hui. Ce premier essai, "Caldeira", se présente sous la forme d’un voyage acoustique, onirique et rempli de paysages sonores doux et calmes. Il y a toujours cette voix, reconnaissable entre mille, ce sens de la mélodie, agrémenté de quelques instruments divers (comme ce theremin inattendu, ou quelques percussions étranges qui viennent peupler ces chansons). Point de batterie héroïque ou de rythmes échevelés, l’heure est au dénuement, des sentiments et de la musique. Seul "Les Falaises" fait l’objet d’une instrumentation plus pop-rock, assez proche des albums d’Autour de Lucie. Elément important, c’est la première fois que la chanteuse confie l’écriture d’un de ses textes à un autre auteur, en l’occurrence Miossec, pour "Un homme blessé" magnifique.
L’ambiance de l’album n’est pas sans évoquer les disques de Ronnie Lane avec Slim Chance, des sonorités pastorales au service de textes marquant l’attirance de Valérie pour les lieux de recueillement, de mise au point, "un endroit" oùu revenir à ses racines. Entre les montagnes et les fleuves, Valérie cherche sa vérité. Et l’album est le résultat de cette recherche permanente. Il est bien connu que l’important, dans la quête n’est pas le résultat final, mais le voyage pour y arriver. Ce disque est le carnet de routes de Valérie. Des routes parfois sinueuses où les joies de l’existence côtoient les bleus à l’âme. Comme elle le chante elle-même sur "Un point de chute" : "Je cherche un point de chute dans ma ligne de fuite / quelques minutes, suspendre la suite / pour un moment". Cette atmosphère intimiste, ces textes hautement personnels rendent "Caldeira" particulièrement attachant.
Frédéric Antona
Mon homme blessé
L’eau du Gange
Caldeira
Au virage
Les falaises
Un point de chute
Un endroit
L’amour désormais
Un cœur gelé
Rien de grave
Pyromane