VIAROSA – Where The Killers Run
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"Standin’ at the crossroads" aurait pu être le titre de ce premier album de Viarosa. C’est en effet à la croisée des chemins que se trouve la musique du groupe américain. Une country qui recherche à chaque instant sa part d’ombre, des réminiscences blues, des dissonances électriques… La voix de Richard Neuberg qui parfois se fait imprécatrice, tel un Jeffrey Lee Pierce moins lyrique, mais tout aussi hanté par les fantômes musicaux qui courent dans cette musique ombrageuse. Autant dire qu’on est loin de Garth Brooks et de la Carter Family ; c’est davantage vers le folk brinquebalant de Will Oldham ou de Nick Cave qu’il faut rechercher les racines du groupe. La liste des instruments présents sur l’album est révélatrice : banjo, mandoline, lap steel… Viarosa est bien dans une quête de ses racines depuis son premier EP, "Porous". "Blindfold", qui ouvre le disque, est une ballade électrique à la manière de Neil Young & Crazy Horse, autre grande influence du groupe. L’album est parcouru de bout en bout par un violon qui évoque à la fois les racines folk et bluegrass du groupe, mais qui est également utilisé pour créer des nappes sonores lancinantes et particulièrement troublantes, ce qui permet à Viarosa de dépasser largement les clivages musicaux traditionnels. Dans "Call to Arms", en particulier, qui constitue en quelque sorte une hybridation entre "Venus in Furs" du Velvet Underground et George Jones, ou encore "Only Child", ballade blues traversé de dissonances électriques. A l’exception de "All This Worry", dans laquelle le rythme décolle véritablement, et où la voix d’Emma Seal détend quelque peu l’atmosphère, c’est davantage une country désolée qui constitue l’apanage de Viarosa, bien que ces ténèbres soient parfois traversées d’instrumentations lumineuses. Sur "Blood from a Stone", ballade en mid-tempo, une steel guitar vient entourer la mandoline de sonorités tour à tour chaudes et rassurantes ou au contraire empreintes d’un vent glacial. Le rythme se ralentit vers la fin de l’album avec l’instrumental "The Violet Hour" et la très belle ballade acoustique "Soul Light", dans laquelle des mandolines et de doux échos de pédal-steel se frayent un chemin sur un tapis de guitares acoustiques. Dernier sursaut, "Whiskeyworld", qui clôt l’album, voit Neuberg développer une voix gutturale et hargneuse, dans un blues du delta sauvage, où le violon et l’harmonica se répondent pendant 2 minutes 35 de folie furieuse. Quand je vous dis qu’il est question de crossroads dans ce disque…
Frédéric Antona
Blindfold
Only Child
Blood from a Stone
Poor Man’s Prayer
Where the Killers Run
Call To Arms
All This Worry (Will Be Over Soon)
Boy
The Violet Hour
Soul Light
Wake
Porous
Out of Edge of Nafplion
Whiskeyworld