SONTIAGO – Steel Yourself
(Endemik Music) – acheter ce disque
Cela fait un petit bout de temps que l’on suit la scène du Maine par ici, mais sans grande conviction. On pensait qu’en s’envolant pour la Californie, les fondateurs d’Anticon n’avaient laissé que quelques miettes à leurs cousins laissés sur place. Les disques sortis là-bas par le label Milled Pavement étaient certes tous intéressants et personnels, ils avaient quelques bonnes idées, et parfois même des titres d’anthologie, mais il leur manquait toujours quelque chose, un brin de finition, de la constance. Jusqu’à ce que Sontiago, responsable d’un « Abuse My Adoration » remarqué par ici en son temps et épouse dans le civil de JD Walker, ancien comparse de Sole au sein des Live Poets, ne signe chez Endemik le meilleur album sorti cette année par le label canadien.
C’est que les choses sont devenues sérieuses avec ce disque : signée chez un label un peu plus visible, accompagnée par des beatmakers de choix (Maker, Alias et Xczircles, entre autres), signalée par URB comme l’un des espoirs rap pour 2007, Sontiago a mis toutes les chances de son côté. Et ça fonctionne redoutablement bien. Même si, formellement, ce hip hop émancipé capable de virer indie rock, de sonner jazzy (« Hollow »), d’exploiter une complainte orientale (« Hold on Me ») ou de verser dans de grandes cordes à la Melody Nelson (« I Spy Fake ») ne surprend plus, même si ces paroles toutes en introspection féminine sont plutôt attendues, la voix légèrement nasale de Sontiago, son ton, ses mots et la liberté avec laquelle elle passe des chantonnements aux raps les plus tranchants, tout cela est assez personnel pour emporter l’adhésion.
D’autant plus que l’album monte progressivement en puissance, quelquefois par les raps (à noter l’intervention d’un Bleubird toujours aussi en verve sur « Crush the Rainbow », ou le numéro à deux avec l’amie dilly dilly sur « Hide’n Seek »), mais surtout grâce aux beats. Dans cette deuxième moitié supérieure à la première, deux titres se distinguent plus nettement. Le premier est ce « Force It » déclamé à la deuxième personne du singulier, renforcé idéalement par un piano, par le chant lyrique d’Amie Lavway et par le refrain de Sontiago (« You can’t change who you are born to be. When there’s a will, there’s a way. You can’t force it ») ; le second est le somptueux « Old Orleans » qui, sur la base d’un texte de Curtis Mayfield, rend hommage à un sauveteur de la Nouvelle-Orléans après le passage de l’ouragan Katrina. Deux titres au-dessus du lot pour un album qui l’est aussi, et qui pourrait bien être le meilleur cette année en matière de rap de blanc crossover porté sur l’introspection.
Sylvain Bertot
Hollow
Faith not Fear feat. dilly dilly
Potential Paralysis
I Spy Fake
Crush the Rainbow feat. bleubird
Hold on Me
Force It
Hide and Seekfeat. dilly dilly
Come Out on Top
Got Me, I Got You feat. dilly dilly
We’ll Still Be Here feat. dilly dilly
Old Orleans
Meg Perry