ALINA SIMONE – Placelessness
(Travelling Music / Musicast) [site] – acheter ce disque
Les anglophones pointus pourraient s’amuser à interpréter le "placeless" du titre, propre à traduire l’errance, la perte de racines, tout aussi bien que l’anonymat des lieux de nos belles cités qui finissent par tous se ressembler. En ce qui concerne la seconde version, les esprits chagrins pourraient même, par analogie, en profiter pour pointer les similarités du style d’Alina Simone avec certaines de ses ainées (au hasard et sans trop se fouler, PJ Harvey ou Cat Power).
Tout ça nous donne forcément une œuvre un tantinet aride. Mais la demoiselle sait aussi se distinguer de cette parenté par de fines touches d’arrangements (de cordes notamment) comme autant de bouffées d’oxygène qui adoucissent le propos (le beau final de "Country of Two", les accents quasi médiévaux de "Swing", ou le country-folk mystique de "Nightswimming"). De quoi la faire paraître moins sèche (ou moins "dérangée"?) que ses inspiratrices. Si la rage et la révolte percent encore ("Black Water"), c’est plutôt une sorte de mélancolie fière et digne qui ressort, l’instinct d’une rebellion déchirante pour la survie : "We’re all refugees […] looking for some place warm and safe to hide", nous dit-elle d’ailleurs (où l’on revient ainsi et aussi sur le thème de l’errance évoqué plus haut).
Cet album, homogène mais moins univoque qu’il n’y paraît, renferme en tout cas suffisamment de personnalité et d’intensité (magnifique "Riot Act" également) pour en faire plus qu’un énième disque de folk féminin et revêche de plus. Il est vrai par ailleurs que ses illustres collègues ont su récemment évoluer vers d’autres territoires, avec plus (PJ Harvey) ou moins (Cat Power) de bonheur
Mais, sans parler même de l’enrichissement de l’instrumentation (encore timide quoique sensible), on a pas de mal à se convaincre qu’Alina Simone dispose, elle aussi, de suffisamment de pistes pour tracer sa propre voie. De quoi à terme couper court à toute comparaison.
A lire également, sur Alina Simone:
la chronique de « Prettier in the Dark » (2007)
Marc Schmit
Velvet Painting
Saw Edged Grass
Refugees
Pacifica
Swing
Nightswimming
Black Water
Lonesome
Riot Act
Country of Two