SPARKLEHORSE + FENNESZ – In The Fishtank 15
(Konkurrent / Discograph) [site] – acheter ce disque
Six ans déjà que Linkous et Fennesz expérimentent ensemble, de-ci de-là, essentiellement en concert. On peut même se procurer le live par lequel tout aurait commencé, enregistré à Genève en 2003 au festival de la Bâtie, pour constater l’approximation, à l’époque, de la collaboration – dont une reprise du « Heart of Darkness », superbe sur « Vivadixie… », sans grand rapport, sur ce live, avec l’original. Pour le reste, on y entend des improvisations quelque peu hasardeuses…
Fan de Sparklehorse, je m’enthousiasmais pourtant à l’idée de retrouver les mélodies, la lenteur, les voix filtrées, voire, à l’occasion, la pop nerveuse et efficace de Mark Linkous. Quant à Christian Fennesz, ses « Venice » et « Endless Summer », son traitement du son et sa sensibilité, la tangente un peu floue qu’il projette entre électricité et électronique, auront été pour moi, musicalement, une petite révolution copernicienne – axée sur le logiciel Max/MSP, qu’il aura au passage vulgarisé, transformant, par granulation interposée, des guitares apaisées en lames de fond denses et obsessionnelles. Pour faire simple, comprenez par là qu’il m’aura ouvert les portes de la perception, comme dirait Jim Morrison. Bref, une affiche idéale dont on avait eu un autre avant-goût sur « Dreamt for Light Years in the Belly of a Mountain » avec la participation de Fennesz sur l’album de Sparklehorse. Là, les deux compères passent au studio, et enregistrent en quelques jours un album entier pour la série « In the Fishtank », du label Konkurrent, dont les choix de duos et les pochettes de disques relèvent autant du bon goût que de l’excellence en communication.
Oui, bon, c’est bien beau ce CV impeccable, mais l’album, ce « In the Fishtank n°15 », qu’est-ce qu’il vaut vraiment ? De fait, pas grand chose. Sur un album sans rebonds, la léthargie – récurrente, et superbe, chez les deux artistes – semble ici s’empiler sans véritable osmose, et sans que les qualités respectives des deux musiciens ne ressortent pour autant. On reconnaît parfaitement les arpèges sous amphé de l’Américain, sa voix tremblante, d’une part, et les mutations sonores, plus discrètes qu’à l’habitude, de l’électrautrichien. Mais il faut croire que les rêveries engendrées par l’un sont d’une essence trop éloignée de celles de l’autre. A part sur « Shai-Hulud » (un concassage sonore à la Autechre), les spirales fennesziennes, organiques et non pulsées, se heurtent au tranchant, même très émoussé, d’une guitare pincée, ou d’une voix murmurée – comme une tentative de se fondre dans cette fine couche de son. Vaine tentative cependant – de fait, l’oreille n’est attentive qu’à une des deux strates à la fois. Les plus optimistes estimeront qu’ils héritent de deux albums pour le prix d’un. On pourra tout de même regretter que la fusion n’opère pas plus sur un album au final plutôt morne.
Music Box of Snakes
Goodnight Sweetheart
Shai-Hulud
If My Heart
Mark’s Guitar Piece
NC Bongo Buddy
Christian’s Guitar Piece