Et si « Blues Funeral » sonnait enfin l’heure du succès pour le ténébreux Mark Lanegan ? Sans doute inspiré par les gracieuses harmonies de ses trois albums en mode ‘Nancy & Lee’ avec l’ex-Belle & Sebastian Isobel Campbell, l’Américain à la voix rocailleuse revient en tout cas avec son disque le plus ouvertement accrocheur (« Gray Goes Black », « Ode To Sad Disco »). Alors bien sûr, nous sommes chez Mark Lanegan, et l’on ne coupera pas aux habituels exercices de folk-blues électronique lugubre dont l’ancien leader des Screaming Trees s’est fait le spécialiste au fil des années (« Tiny Grain Of Truth »). Pourtant, même les titres aux abords les plus sombres se voient miraculeusement relevés par des mélodies lumineuses et mémorables (« St Louis Elegy » avec son gutter twin Greg Dulli, « Bleeding Muddy Water »). Hélas, notre enthousiasme initial est ailleurs tempéré par quelques ratages spectaculaires. On ne pourra en effet s’empêcher de ressentir un léger embarras en voyant le bonhomme se perdre dans un rock graisseux n’évoquant au mieux qu’une indigne resucée de ses productions passées, tel cet interminable « Riot In My House » que même la guitare de l’immense Josh Homme ne parvient pas à sauver du naufrage. Tout comme on aura bien du mal à réprimer un bâillement sur « Phantasmagoria Blues » ou « Harborview Hospital », aux mauvais accents de U2 en virée à Joshua Tree… Dommage, car ces quelques sorties de route regrettables nous empêchent de profiter pleinement du retour tant attendu de Mark Lanegan sous son propre nom. Mais si ce septième album n’est pas le chef-d’œuvre escompté, et ne rivalise que trop rarement avec son imposant prédécesseur (« Bubblegum », 2004), il a au moins le mérite de nous présenter une nouvelle facette (plus douce, plus consensuelle également) de cet artiste à la voix incomparablement profonde. Et qui reste capable de vraies réussites, à l’image du stonien « Quiver Syndrome » ou du folk habité d’un « Deep Black Vanishing Train » au dépouillement idéal.
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