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Disques

Astrïd – High Blues

Astrïd - High Blues

Devinette : qu’est-ce qui ressemble le plus à un disque d’Astrïd, à part un autre disque d’Astrïd ? La formation de Cyril Secq et Yvan Ros abonnée aux longues épopées instrumentales creuse depuis 15 ans une sillon rigoureux entre post-rock et néo-classique ambient. Autant vous prévenir de suite, nous sommes ici dans les marges, à la frontière de l’empire pop et du monde barbare où le droit romain ne s’applique plus. C’est à Rune Grammofone, filiale norvégienne d’ECM, que le quatuor a prêté allégeance pour la sortie de son troisième album. Un label « tête chercheuse » qui lui va comme un gant même si on pouvait en dire autant d’Arbouse Recordings, leur ancienne maison aveyronnaise.

Je l’ai déjà dit, la musique d’Astrïd s’apprivoise lentement et avec patience. Petit conseil d’ami, éviter la surenchère. Inutile par exemple de l’écouter par un dimanche pluvieux ou pour soigner un chagrin d’amour. Le ton sur ton passerait pour une faute de goût. Diluée à l’infini, cette musique extatique s’accommoderait presque de la gesticulation urbaine, des couloirs du métro ou d’un soleil de plomb dans un village provençal. C’est en jouant le contrepied qu’on entre le mieux dans ce « High Blues ». Cinq pistes éthérées qui grondent ou qui bercent, comme le bruit de la mer. L’album s’ouvre sur une longue odyssée de 21 minutes traversée par une guitare réverbérée jouant un motif répétitif. Neil Young, sors de ce corps ! Ensuite, vient une reprise décharnée de la première gnossienne de Satie. Puis le groupe s’ébroue et change de rythme de croisière avec « Suite », titre charnière, sur lequel résonne un tambour de garde-chiourme. Mais il faut attendre « James » ou « Bysimh » pour entendre les passages les plus intenses de l’album, quand tous les instruments jouent ensemble et remplissent l’espace de leurs textures chaudes et âpres.

Ne sachant à quel saint se vouer, l’auditeur voyagera pendant près d’une heure dans cette terra incognita émaillée de fausses pistes. En dépit de morceaux étirés, Astrïd est un groupe de taiseux qui joue le silence avec brio. Cet ascétisme de façade, capable d’envolées lumineuses qui ont l’art de se faire attendre, ne cultive qu’une seule chose, le mystère de la beauté.

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